Devant plusieurs milliers de personnes, le Front de Gauche a tenu son meeting de lancement de campagne, le 30 juin dernier.
En remplissant la place Stalingrad, à Paris, mercredi 29 juin, les différentes composantes du Front de Gauche ont atteint leur objectif : lancer la campagne présidentielle autour de leur candidat Jean-Luc Mélenchon. À l’heure où, du Caire à Athènes, de Tunis à Madrid, la contestation populaire s’affiche sur les places publiques, le choix de rompre avec le classique meeting en salle s’est avéré pertinent, puisque plus de 4 000 participants avaient répondu à l’appel. Le travail de préparation très significatif durant les trois dernières semaines, par des collages et de nombreuses diffusions de tracts, a sans nul doute contribué à stimuler les équipes militantes d’Île-de-France qui constituaient la plus grand partie de l’auditoire. Notons également la présence de ce courant désormais permanent depuis la campagne pour le non au TCE, des non-encartés qui, à gauche du PS, oscillent en permanence entre anticapitalisme radical et antilibéralisme. Mais gardons-nous d’une comparaison avec les bouillonnements créatifs de la place Tahrir ou de la Puerta del Sol, car le meeting auquel nous avons assisté était des plus classiques.
Prenant par ordre d’importance chacune la parole, les diverses composantes du Front de Gauche ont défini la place qu’elles occuperont dans le dispositif de campagne. Ainsi, Christian Piquet pour la Gauche unitaire se voit confier la présidence du comité de campagne, une garde rapprochée qui réunira une quinzaine de membres. Un conseil national de campagne plus large (une centaine de personnes) sera également constitué. Clémentine Autain dans son intervention en appelait à « ceux qui ont cru au NPA et qui en sont déçus », se plaçant ainsi en pôle de recrutement à gauche du Front de Gauche. Très à l’aise sur les questions féministes, sociétales et écologiques, elle pourrait constituer un contre-poids aux « lourdeurs républicaines » du candidat.
Mais l’enjeu principal de ce meeting était pour la direction du PCF d’introniser Jean-Luc Mélenchon comme candidat de tout le Front de Gauche, face à une base du parti encore très partagée. L’intervention de Pierre Laurent était toute entière dirigée vers cela : rassurer les militants, imposer tant que faire se peut une direction collective à la campagne. Si l’on en juge par l’intervention de Jean-Luc Mélenchon, il n’est pas certain qu’il y ait totalement réussi. Il y eut, certes, les remerciements d’usages aux « militants communistes », l’appel aux altermondialistes, aux féministes, aux syndicalistes et aux militants des droits de l’homme, sans que l’on sache vraiment quel pouvait être le projet commun apte à unir toutes ces forces. Rappelons qu’à l’occasion de la mobilisation de l’automne dernier contre la casse du système des retraites, dans un splendide isolement, Jean-Luc Mélenchon avait, au plus fort de la mobilisation, proposé d’enterrer le grand mouvement populaire par un référendum. Le discours tenu mardi va dans le même sens, en s’en tenant à des formules institutionnelles abstraites sur la vie République, la révolution par les urnes, pacifique et démocratique.
Pas une seule proposition qui impliquerait la mobilisation des salariés et des couches populaires. Pas une seule allusion au Parti socialiste, à son programme, à la question des alliances et aux éventuels accords de gouvernement au cours de la longue allocution du leader du Parti de Gauche. Il faudra bien pourtant, pendant cette campagne électorale, que ce débat ait lieu ! Les tirades gaulliennes qui semblent être au cœur de la stratégie de communication de Mélenchon ne pourront l’éluder. Le NPA et son candidat Philippe Poutou ne manqueront pas de revenir, en toute fraternité, sur ces questions stratégiques décisives.
Alain Pojolat