À l’heure où nous écrivons ces lignes, l’ampleur de la mobilisation du 27 janvier n’est pas connue. Traditionnellement, il est rare que de grandes mobilisations aient lieu à l’approche d’élections nationales. Mais leurs percées montrent l’ampleur de la crise sociale et l’urgence d’une réponse anticapitaliste.
En 2017, la mobilisation en Guyane, à l’initiative des 500 Frères et des organisations syndicales, avait marqué la campagne et fait apparaître devant des millions de personnes la réalité du colonialisme français et de la situation sociale dans les territoires d’Outre-mer. Cette année, ce sont les mobilisations aux Antilles qui se sont invitées dans la campagne. Démarrées contre le pass sanitaire, elles se sont élargies à la dénonciation de la situation sociale et à la pénurie dans le secteur de la santé en Martinique et en Guadeloupe.
La mobilisation du 27 janvier sur les salaires et l’emploi s’inscrit dans une dynamique différente, le mouvement ouvrier n’ayant pas, en métropole, participé activement aux mobilisations contre le pass sanitaire puis le pass vaccinal. Mais elle est pourtant le révélateur d’une situation sociale dégradée et devenue insupportable pour une grande partie de la classe ouvrière.
Augmenter les salaires, réduire le temps de travail
Ainsi, le salaire moyen en France, de 2 330 euros net par mois, cache une autre réalité : le salaire moyen net réellement perçu par unE employéE est de 1 200 euros net et de 1 330 euros net pour unE ouvrierE.
Pendant ce temps, de l’autre côté de l’échelle, ils se gavent. Les sociétés non financières (les entreprises qui produisent des biens et des services, moins les artisanEs, commerçantEs et autres indépendantEs) ont engrangé environ 140 milliards d’euros de bénéfices. Les entreprises du CAC 40 distribuent à leurs actionnaires environ 60 milliards d’euros, tandis que l’évasion fiscale représente environ 80 milliards d’euros. Ces chiffres se recoupent en partie, mais si on ne prenait « que » les 140 milliards de profits annuels réalisés sur notre dos, on pourrait financer une augmentation de 720 euros brut pour les 16 millions de salariéEs qui gagnent moins de 2 300 euros… Alors, oui, notre revendication d’un salaire minimum de 1 800 euros net n’est pas invraisemblable ! Elle nécessite juste de prendre l’argent là où il est.
Augmenter les salaires est une chose mais, pour bien des salariéEs, il faudrait déjà qu’ils et elles aient un emploi. Alors nous revendiquons le passage immédiat aux 32 heures sans perte de salaire, vers la semaine de quatre jours et les 28 heures, et l’embauche d’un million de personnels dans la fonction publique, à commencer par la santé et l’éducation. Tout cela permet d’offrir un emploi à chacunE, tout en ne souffrant plus au travail, en ayant du temps personnel et pour débattre démocratiquement du fonctionnement de la société, de ce qu’on produit, pourquoi et comment, de s’engager.
Pour que les luttes s’invitent dans la campagne
Cette mobilisation du 27 janvier en appelle d’autres. En effet, la mobilisation dans l’éducation, la colère dans la santé ont montré que la situation actuelle devient insupportable, entre les conditions de travail dans le cadre de la pandémie, les bas salaires, alors que l’inflation se confirme comme une réalité qui rogne chaque mois un peu plus nos conditions de vie.
Face à ces mobilisations, Macron et son gouvernement continuent leur politique libérale et autoritaire, avec le pass vaccinal, le projet d’augmentation des frais d’inscription dans les universités, la pénurie dans les services publics, dans une surenchère avec Pécresse… L’extrême droite, de son côté, veut attaquer directement la Sécurité sociale en supprimant les cotisations sociales. Zemmour comme Le Pen exercent une pression sur la droite traditionnelle et sur Macron pour accélérer les politiques autoritaires, racistes et antisociales. Avec le soutien ou la complicité de la plupart des grands médias, et notamment le CNews de Bolloré.
Il est tant que les luttes changent le climat politique de cette campagne. Les mobilisations dans l’éducation ont marqué des points, tout en n’obtenant pas de réelles avancées. Celle du 27 janvier montre qu’il est possible et indispensable de revendiquer pour ses conditions salariales et de travail en période électorale. Les mobilisations du 8 mars pour les droits des femmes et du 19 mars pour les droits des étrangerEs doivent contribuer à mettre sur le devant de la scène les revendications sociales. En espérant que la question climatique et la question de la santé se retrouvent également portées par des secteurs, de la jeunesse ou du monde du travail, dans la prochaine période.
Pour le NPA et Philippe Poutou, toutes ces luttes, si elles sont fortes, si elles se rejoignent, peuvent aussi poser le problème politique du pouvoir : la nécessité de se débarrasser de Macron et d’un personnel politique qui n’a pour objectif que de servir les classes dominantes. Et, à l’opposé, la nécessité d’imposer un pouvoir d’en bas, celui de celles et ceux qui produisent les richesses, les exploitéEs et les oppriméEs, pour en finir avec le capitalisme.