Le 16 novembre dernier, Sarkozy a justifié sa politique, se moquant ouvertement des millions de personnes qui ont protesté ces derniers mois. Mais sa volonté d’apaisement risque de se heurter à la combativité populaire et au retour des affaires. L’omniprésident Sarkozy est apparu en petite forme lors de sa prestation télévisée, le 16 novembre. Étant donné la mobilisation sociale exceptionnelle de cet automne, il ne pouvait pas se permettre d’être trop arrogant. Ne nous y fions pas. Dans ce qu’on est obligé d’appeler un exercice convenu, le chef de l’État a confirmé qu’il était le président des riches et uniquement cela. Il a d’ailleurs annoncé la couleur puisque la réforme fiscale à venir prévoit la suppression pure et simple de l’impôt sur la fortune. Il n’a pu s’empêcher de laisser libre cours à un certain cynisme en soutenant que le recul de l’âge de départ à la retraite allait permettre de créer des emplois. Une aberration, un comble de mauvaise foi, surtout venant de celui qui assume les 125 000 suppressions d’emplois dans la fonction publique. Même cynisme lorsqu’est évoquée la chasse aux Roms orchestrée par le pouvoir depuis le mois d’août : la stigmatisation des Roms incomberait aux médias et non aux propos présidentiels eux-mêmes. Même s’il doit reconnaître l’échec de son ministère de l’Identité nationale et son rejet par de larges secteurs de la population, il confirme la poursuite de sa politique raciste et xénophobe. D’ailleurs, Nicolas Sarkozy assume toute sa politique, qu’elle soit sécuritaire ou antisociale. Avec des accents de fausse modestie, il a déroulé la pelote des mesures qu’il compte mettre en route ou poursuivre. La santé est dans le collimateur avec la loi Bachelot. La réduction des dépenses sociales est à l’ordre du jour, avec la fermeture de lits et de services, voire d’hôpitaux de proximité, à tel point qu’on ne pourra plus parler de service public de santé. D’ailleurs le fait que le ministère de la Santé se soit transformé en simple secrétariat d’État doit nous interpeller et nous alerter. Tout comme les pistes avancées pour la prise en charge de la dépendance qui suivent la logique de la contre-réforme des retraites : le remboursement par la Sécurité sociale sera minimum. L’impôt affecté (CSG) ou une nouvelle « journée de solidarité » se substitueraient au financement par les cotisations sociales. À cela s’ajouterait un financement individuel qui pourrait être gagé sur les biens de la personne ! Enfin, cerise sur le gâteau, le complément nécessaire pourrait alors être assuré par des mutuelles ou des assurances privées comme Malakoff Mederic (dirigée par le frère Sarkozy, Guillaume) et Axa qui sont déjà en embuscade. En un mot, la prise en charge de la dépendance ne coûtera rien aux patrons et sera supportée par les personnes concernées et leurs familles. Sarkozy, Fillon et son gouvernement de « combat », comme il l’a lui-même qualifié, annoncent très clairement qu’ils veulent continuer de faire payer la crise à la majorité de la population. Pourtant le pouvoir est affaibli : il sort discrédité, illégitime même aux yeux d’une grande majorité de l’opinion. Les affaires se poursuivent, après Bettencourt, l’affaire Karachi connaît également des rebondissements. Sarkozy est directement compromis et mis en cause. Il ne s’agit plus d’une « fable » mais bien de faits concrets : des rétrocommissions sur des ventes d’armes au Pakistan auraient permis de financer la campagne présidentielle d’Édouard Balladur dont l’actuel président était le porte-parole. Des pratiques frauduleuses donc, des malversations. Et puis aussi des victimes, les quinze de l’attentat de Karachi en 2002. Le moins qu’on puisse dire c’est que l’opacité règne. Il est plus que légitime d’exiger que toute la lumière soit faite et que Nicolas Sarkozy soit entendu par la justice. Pas de « chance » pour celui qui voulait sans rire « moraliser le capitalisme », la France venant de prendre en charge la présidence du G20 pour un an. Période durant laquelle Sarkozy va pouvoir mettre en avant son programme que le président socialiste du FMI Dominique Strauss-Khan a vanté et qualifié d’ambitieux ! Cela étant, après l’échec du dernier G20, il devra sans doute réserver ses effets d’annonce. Dans un contexte de paralysie des outils de « gouvernance mondiale », pas sûr que les numéros de claquettes sur la scène internationale puissent faire oublier la politique intérieure. En tous les cas, pas de doutes, les attaques libérales vont continuer tous azimuts. En France et en Europe : les Irlandais goûtent pour la deuxième fois depuis le début de la crise à la potion amère « austérité ». Le tour des Portugais ne saurait tarder. Ici comme ailleurs, à nous de relever le défi dans le prolongement du formidable mouvement de ces derniers mois sur les retraites qui nous indique qu’il faut encore résister et se battre.Myriam Martin