Aéroports de Paris, Engie, Française des jeux... tout ça est à vendre selon les termes du projet de loi « Pacte » qui va être présenté par le gouvernement. Il faut y ajouter les barrages hydro-électriques.
La loi « Pacte » va lever les contraintes légales qui obligent l’État à détenir la majorité des parts d’Aéroports de Paris (ADP), le tiers du capital ou des droits de vote d’Engie, et qui stipule le caractère public de la Française des jeux (FDJ).
Le but affirmé par le gouvernement est de dégager des sommes pour financer la recherche et l’innovation, en particulier dans l’industrie. Le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, déclare aux Échos que « l’État n’a pas vocation à diriger des entreprises concurrentielles à la place d’actionnaires qui ont la compétence et les savoir-faire pour le faire mieux que lui ». Pour rassurer celles et ceux qui auraient quelque doute sur cette capacité des actionnaires à être autre chose que des rapaces, il ajoute : « Nous ne reproduirons pas l’erreur qui a été faite sur les autoroutes ». On se souvient en effet de cette braderie sans contrôle au privé des réseaux d’autoroutes (initiée, en 2002, par la gauche sous Jospin, bouclée en 2005-2006 par la droite avec Villepin). Le réseau, construit aux frais du contribuable, rentable, s’est transformé en vache à lait pour les actionnaires de Vinci et autres.
« GDF ne sera jamais privatisé ! »
Le but affirmé de ces nouvelles privatisations est de dégager des moyens pour financer la recherche et l’innovation. C’est toujours la même chanson pour baisser les impôts des entreprises et leur accorder des subventions diverses. Le seul vrai motif de ces privatisations (outre une réduction minime de la dette), c’est de livrer au capital privé des secteurs rentables.
Pour Engie (ex-Gaz de France), c’est au mépris de tous les engagements de l’État. Lors du débat sur la transformation de GDF en société anonyme, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Économie, déclarait devant l’Assemblée nationale : « EDF-GDF ne sera pas privatisée, ni aujourd’hui ni demain. » La loi du 9 août 2004 prévoit que L’État doit détenir 70 % du capital. Peu à peu, après la fusion de GDF avec la société privée Suez, la part de l’État est réduite à environ un tiers. Il s’agit maintenant de procéder à une privatisation totale (avec celles d’Aéroports de Paris et de la Française des jeux).
La privatisation de la Française des jeux est, c’est une évidence, lourde de dangers. Tout le monde sait en effet qu’il existe un risque d’addiction aux jeux d’argent et que le jeu est un des moyens du blanchiment de l’argent sale. En 2010, Sarkozy avait libéralisé les jeux en ligne au profit de ses copains (en 2003, alors ministre, il avait trouvé le temps de favoriser les machines à sous). Macron continue et amplifie !
Quant à l’efficacité économique du privé... une enquête récente faite pour l’Association internationale des compagnies d’aviation montre que les aéroports privatisés sont plus chers pour les compagnies que les aéroports publics et pas plus efficaces. La grande différence, c’est que les profits des aéroports privés sont deux fois plus élevés !
Les barrages livrés aux turpitudes du capital
Autre exemple de cette furie prédatrice, le 7 février dernier, le gouvernement Philippe a acté la privatisation du secteur hydroélectrique français : d’ici 2022, 150 des plus grands barrages (plus de 20 mètres de haut) devraient être vendus. Le gouvernement français dit qu’il est obligé de se plier à une injonction de la Commission européenne, mais d’autres États-membres y ont résisté par des biais juridiques divers. Le secteur hydroélectrique représente 12,5 % de la production d’électricité française, 70 % des énergies renouvelables. C’est l’électricité la moins onéreuse : de 20 à 30 euros le MWh. Les barrages, par leurs réserves d’eau, compensent l’intermittence des autres énergies renouvelables et jouent un rôle majeur dans la bonne gestion des fleuves et rivières. On voit ce qui pourrait résulter de la soumission de leur gestion à un actionnariat soucieux de profits rapides…
Se battre contre les privatisations, c’est refuser une soumission encore plus grande d’activités essentielles à l’appétit des actionnaires privés. Sans bien sûr se bercer d’illusions sur la gestion par un État technocratique et soumis au capital.
Henri Wilno