Étonnant, le culot de Sarkozy s’indignant de « l’instrumentalisation politique de la justice », d’un « chef d’accusation grotesque », d’une « petite minorité militante » en parlant des magistrats... pour revendiquer que Paul Bismuth, son double, soit l’objet d’une procédure normale !
Toujours la même méthode, bluff et mensonges, accuser, dénoncer et poser, le cœur sur la main, à celui qui aime son pays et n’a jamais trompé personne. Une victime, de toute évidence...
Culot et arrogance« Corruption active », « trafic d’influence » et « recel de violation du secret professionnel », mais pour l’homme des agapes du Fouquet’s, il n’y a dans toutes ses aventures financières rien que de très normal, la routine du pouvoir décomplexé... Mais pour le commun des mortels, même sans saisir l’importance des sommes en jeu ni des réseaux d’influence impliqués, tout cela semble assez peu normal !Les propos indignés des amis de l'ex-Président, dénonçant un « acharnement » ou comme Estrosi, « un tel déferlement de haine », n’arrivent pas à masquer l’invraisemblable suite d’affaires auxquelles leur homme providentiel est mêlé. Même Juppé, certes un ami peu sûr, n’hésite pas à déclarer : « Je n’ai jamais cru au complot ». L’affaire Bettencourt, celle de l’arbitrage Tapie, Bygmalion, l’éventuel financement libyen de la campagne présidentielle de 2007 ou, avant, celle de Balladur, cela fait système. Les derniers rebondissements de ce roman policier financier ont été déclenchés par la diffusion le 20 juin 2013 par France 2 d’un reportage dans lequel Moftah Missouri, diplomate libyen, affirmait qu’une « vingtaine de millions de dollars » avait été versée à Sarkozy par l’intermédiaire de Guéant pour sa campagne de 2007, confirmant au passage l’authenticité du document prouvant cet arrangement publié en 2012 par Mediapart.
Faire taire les juges et la presseDans cet imbroglio, les juges Tournaire et Grouman ont fait leur travail quand ils ont décidé de placer Sarkozy, Paul Bismuth (son nom d’emprunt), Brice Hortefeux et Claude Guéant puis Thierry Herzog, l’avocat de Sarkozy, et le juge Azibert, promu par ce dernier, sur écoute dans le cadre d’une enquête pour corruption. Les journalistes de Mediapart étaient parfaitement dans leur droit, en rendant public le contenu des écoutes. La procédure de mise en examen et de garde à vue était tout à fait légale au regard de l’accusation, l’issue de la garde à vue aussi, Sarkozy conduit, la nuit, du commissariat au tribunal par la police. Quant à la basse manœuvre qui consiste à se présenter comme victime de juges membres du Syndicat de la magistrature, elle ne résiste pas 30 secondes ni aux faits... ni au respect de l’indépendance de la justice.Et c’est bien cela que Sarkozy et ses amis ne peuvent supporter : des juges indépendants. Pour eux comme pour les riches, tout leur est dû. Lui et ses amis comme le FN souhaiteraient interdire à un magistrat d’être syndiqué. Guaino est sans ambiguïté : « Je pense que le syndicalisme est devenu un des plus grands maux de la magistrature. (...) Il faut l’interdire », soutenu par Nadine Morano et la Droite forte de Guillaume Peltier qui demande « l’interdiction de la syndicalisation des juges dans la magistrature ».
En finir avec la république des affairistesPour eux, le problème, ce ne sont pas les affaires, la corruption, l’utilisation de l’État à des fins personnelles et de carrière, les 80 millions de dettes de l’UMP... Non, le problème, ce sont les juges et les journalistes indépendants !Au-delà des pratiques décomplexées de la bande du Fouquet’s, ces affaires mettent en lumière, après celles qui ont touché le Parti socialiste, les mœurs de leur République, la république des affairistes. Si l’État est si généreusement au service des possédants, il peut bien aussi être au service de ceux qui les servent. La logique du tout financier, c’est la spéculation et la corruption érigées en système. Et leur réponse à la crise sociale et politique que cette logique engendre, c’est faire taire celles et ceux qui en sont victimes, bâillonner les juges et la presse indépendants.Notre réponse, c’est une démocratie révolutionnaire, l’intervention des vraies victimes, les travailleurs, les classes populaires, et de toutes celles et ceux qui refusent le pouvoir du fric pour transformer la société. Contre l’aristocratie financière, un nouveau 14 juillet est à l’ordre du jour...
Yvan Lemaitre