À partir du 5 mai, une série de grèves va toucher la SNCF. Le mouvement est notamment parti d’un appel des contrôleurEs organisés dans un collectif en dehors des organisations syndicales, le CNA (Collectif national des agents du service commercial trains ou ASCT).
Il y a plusieurs revendications, mais le mécontentement porte principalement sur les conditions de travail qui sont dégradées par de nouveaux outils informatiques de commande du personnel. Ces nouveaux logiciels sont prévus pour optimiser au maximum les emplois du temps des contrôleurEs. Résultat : des commandes de travail sont modifiées en permanence, voire au dernier moment, imposant des découchés non prévus, en annulant d’autres ou modifiant des journées travaillées sur les dimanches et les jours fériés, par exemple.
Cette recherche de rentabilité à outrance par la direction a des effets concrets sur la vie quotidienne de milliers de cheminotEs dans l’incapacité d’organiser une vie privée, familiale un peu à l’avance. Comment organiser ses vacances ou un week-end en famille quand les congés sont accordés au dernier moment ? Enfin, les ASCT demandent une hausse mensuelle de la prime de travail. Ils ont donc appelé à une grève les 9, 10 et 11 mai prochain.
Un mouvement qui fait tache d’huile
Ce mouvement catégoriel a donné des idées à d’autres secteurs. Ainsi les conducteurEs de train ont décidé de rejoindre le mouvement de grève : à partir du 5 mai pour la CGT, qui anticipait déjà un mouvement pour les conducteurEs, et le 7 mai pour Sud Rail. S’en est suivi un appel à la grève dans les ateliers de maintenance du matériel le 6 mai et maintenant dans les gares (guichets, agents d’accueil, départ des trains, etc.) pour le 5 mai.
Après tout, les problèmes que rencontrent les contrôleurEs sont ceux de tous les cheminotEs : une augmentation de la prime de travail de 200 euros pour toutes et tous serait tout à fait justifiée et par ailleurs confortée par les « bons » chiffres de la SNCF qui vient de réaliser 1,6 milliard de profits pour 2024. Idem pour ce qui est des modifications de commandes ou des congés refusés ou accordés au dernier moment : tout le monde est concerné, et c’est principalement par des embauches massives que le problème pourra être résolu.
Ici et là, chaque secteur « rajoute » une revendication propre. Par exemple, dans les gares tous les emplois ne sont pas considérés comme relevant de la pénibilité : un poste tenu en 2 × 8 heures avec des prises de services à 6 heures du matin et des fins de service à 22 heures avec travail les dimanches et jours fériés n’est pas repris dans la liste des emplois pénibles. C’est d’autant plus dommageable que la pénibilité est importante pour le calcul de la retraite, notamment depuis un accord passé l’année dernière.
Déferlement anti-grévistes
Depuis l’annonce de la grève autour du pont du 8 mai, les membres du gouvernement et les médias s’en donnent à cœur joie contre les grévistes « preneurs d’otages ». De toute façon, ça ne va jamais : si la grève tombe en semaine, elle empêche les gens d’aller travailler, mais si elle tombe un week-end, elle empêche les gens de partir en vacances…
Gageons que la grève de début mai fonctionne pour le mieux. Cette grève « tournante » catégorie par catégorie relève d’une volonté de tenter autre chose que l’appel à « la grève carrée » (24 heures) ou la grève reconductible. Ce n’est pas nouveau, nous avons déjà connu en 2018 un appel à la grève « différent » (deux jours sur cinq pendant plusieurs mois) avec un résultat plus que mitigé.
Il faudra donc tout faire pour qu’au final cette grève permette aux cheminotÊs de se retrouver tous ensemble et d’étendre la grève à tous les services pour imposer des revendications communes.
Si la grève des contrôleurEs a donné des idées aux autres cheminotEs, la grève des cheminotEs pourrait donner des idées, ou au moins confiance, aux autres secteurs du monde du travail pour imposer des embauches et des augmentations de salaires dans les entreprises et les services publics.
Car derrière les attaques en règle du gouvernement contre la grève qui vient, c’est bien la peur d’une extension qui est en jeu.
Correspondant