La nouvelle mouture de la réforme des lycées, présentée par Sarkozy, vise à adapter l’enseignement à la baisse des moyens et à contrôler les jeunes pour les sélectionner et en exclure certains.
Dix mois après le retrait du projet Darcos, Sarkozy a annoncé, le 13 octobre, les grandes lignes de la réforme des lycées qui devrait entrer en application dès la rentrée 2010. Sans doute pour éviter toute mobilisation avant les régionales, le projet a été sensiblement édulcoré par rapport à celui qu’il avait dû retirer en 2008 face à la mobilisation lycéenne faisant suite à celle de la jeunesse grecque. Il ne s’agit pas pour autant de simples aménagements. Cette réforme comporte de réels dangers et de nombreuses zones d’ombre.
L’une des mesures phares permettra aux lycéens de disposer de deux heures d’accompagnement. Leur emploi du temps n’est pas alourdi, mais cela signifie une baisse du volume horaire d’enseignement.
Réalisé « à moyens constants » – 16 000 postes seront supprimés l’an prochain –, ce soutien sera donc effectué par des enseignants payés en heures supplémentaires, voire par des étudiants de master (cf. le rapport Descoings). Le recours aux « locuteurs natifs » pour un meilleur apprentissage des langues étrangères (sans allègement des groupes de langues, mais par la mise en place de « groupes de compétences »), les partenariats culturels et les stages de « remise à niveau » pendant les vacances participent de la même logiqued’adaptation et de poursuite de la suppression de postes (80 000 en cinq ans).
On a tout lieu de s’inquiéter aussi du volet « orientation » de la réforme, quand dans le même temps le service public d’orientation est remis en cause au profit de la généralisation de plateformes Internet. L’orientation en cours de parcours scolaire, sous prétexte du « droit à l’erreur » et à la « réorientation », risque de conduire à l’éviction vers la voie professionnelle les élèves les plus fragiles et de renforcer le tri social.
La revalorisation des bacs technologiques et le « sauvetage » de la filière L semblent bien loin d’une remise en cause de la hiérarchie des filières et de l’hégémonie de la sacro-sainte filière S. En outre, la fin progressive du caractère national du bac, seule garantie aujourd’hui d’une relative équité entre les candidats, est à l’ordre du jour, avec notamment l’introduction d’un contrôle continu sans garde-fous. La place du livret de compétences et son articulation avec le baccalauréat doit être à cet égard un sujet d’inquiétude, d’autant plus qu’il contribuera au fichage des élèves et des étudiants.
Enfin, Sarkozy renforce encore l’autonomie des établissements, dans un premier temps pour l’organisation du soutien. Pour lui, « il est clair que de nouveaux équilibres doivent être imaginés », ce qui annonce des aménagements de programmes et d’horaires à la discrétion des établissements et une remise en cause du principe d’égalité entre les lycées.
Ce projet, loin d’être une réformette, accompagne la saignée de l’enseignement public. Il convient donc de préparer une riposte à la hauteur. C’est possible à condition que les principales organisations syndicales soient plus déterminées à construire le rapport de forces qu’elles ne l’ont été jusqu’ici.
Équipe d’animation Éducation région parisienne