Une décision de justice du 8 décembre 2022 a interdit aux responsables du syndicat CGT historique de PSA Poissy de se prévaloir d’une appartenance à la CGT. Plutôt que d’accepter la position de la majorité des syndiquéEs de l’usine de Poissy ainsi que celle des syndicats de PSA Stellantis, la fédération de la métallurgie avait organisé l’appel à un tribunal pour faire valoir l’expulsion de tout un syndicat de l’une des principales usines automobiles en France.
Dans l’automobile, plus que dans le reste de la métallurgie et dans les autres secteurs d’emploi, le patronat est à l’offensive, comme en témoignent fermetures d’usines et chute continue des effectifs salariés depuis au moins vingt ans. Le mouvement syndical est atteint dans ses bases mêmes et la fédération de la métallurgie de la CGT est particulièrement à la peine. Ses effectifs revendiqués lors de son dernier congrès à Montpellier en 2022 sont de 52 000 adhérentEs dont 10 000 retraitéEs, contre 60 000 il y a dix ans, et plus de 300 000 dans les années 1970.
Des militants combatifs visés
Et c’est le moment où la fédération CGT et l’UD 78 choisissent d’exclure un syndicat CGT dont l’une des figures marquantes est Jean-Pierre Mercier, ancien animateur de la longue grève de l’usine d’Aulnay contre sa fermeture, délégué central CGT pour tout le groupe PSA, et aussi porte-parole de Lutte ouvrière. Le secrétaire du syndicat Farid Borsali avait été l’objet d’une répression patronale indigne en 2017 suscitant une pétition nationale dont le premier signataire était...Philippe Martinez. Bref, des militants reconnus dans leur usine mais aussi au niveau de PSA, puisque tous les syndicats CGT du groupe, à l’exception d’un seul, ont manifesté leur soutien au délégué central.
Cette exclusion vise un syndicat et des militants combatifs clairement identifiés. Il s’agit de reprendre en main, au-delà de l’usine de Poissy, la coordination CGT des syndicats PSA qui refusait jusqu’à présent tout accommodement avec la direction de PSA Stellantis. C’est en rajouter sur la crise générale du mouvement syndical qui trouve ses racines dans les pièges du « dialogue social » et la dégradation des rapports de forces pour les salariéEs.
Le passage à SUD, pas d’autre choix
Le syndicat CGT historique est passé à SUD à la suite de cette exclusion. Faute des protections légales que permettent des mandats de délégué, un salarié n’a notamment pas le droit de se déplacer hors de son poste de travail pour aller en défendre un autre, même lors de ses pauses. Ainsi la direction de l’usine a convoqué, pour avertissement ou menace de sanction, 32 militants dont les mandats tenant à leur appartenance au syndicat CGT historique sont contestés.
Rejoindre un autre syndicat était donc la seule possibilité pour continuer à militer dans cette usine, et il n’y avait pas d’hésitation entre SUD, jusqu’alors non présent chez PSA, et les autres syndicats englués dans l’accompagnement des politiques patronales. Le congrès constitutif du syndicat SUD à Poissy tenu le dimanche 11 décembre a compté 215 adhérentEs. Au vu de la situation d’ensemble du mouvement syndical, c’est un réel succès pour une usine de 5 500 salariéEs.
Dans une lettre ouverte, les responsables syndicaux de l’usine de Poissy, Jean-Pierre Mercier et Farid Borsali, indiquent qu’ils n’ont pas changé en passant à SUD. Personne dans le milieu militant ne peut avoir de doute là-dessus. Et bien sûr SUD a accueilli ce nouveau syndicat en connaissance de cause.
L’unité toujours à construire
Mais il n’y pas de quoi pavoiser. Le résultat, c’est une division supplémentaire dont la responsabilité incombe à la seule fédération de la métallurgie CGT. Avec l’assentiment de la direction confédérale. Malgré cette politique diviseuse, de nombreux travailleurEs combatifs continueront à militer dans les syndicats CGT. Au-delà même des travailleurEs combatifs, c’est bien la majorité des salariéEs des établissements PSA Stellantis, sous statut, intérimaires, précaires, syndiquéEs ou non qu’il faut entraîner dans l’action et l’unité pour construire des luttes sous le contrôle réel des travailleurEs. Une tâche incontournable en particulier dans les syndicats CGT et SUD.