L’épidémie de coronavirus est un révélateur de la fragilité du système capitaliste et des dangers qu’il fait peser sur les classes populaires, notamment par son productivisme congénital et le type de politique, causes fondamentales de la crise écologique et climatique.Le fait que le ralentissement économique a précédé le Covid-19 ne doit conduire à nier ni l’impact économique de l’épidémie (interruption de productions, rupture des chaînes d’approvisionnement, impacts sectoriels sur le transport aérien et le tourisme, etc.) ni le sérieux de la menace qu’elle constitue en tant que telle. Phénomène disruptif à dynamique exponentielle, l’épidémie est un amplificateur spécifique de la crise économique et sociale.
Une politique absurde
Juguler l’épidémie aurait nécessité de prendre rapidement des mesures strictes de contrôle sanitaire des voyageurs venant de régions contaminées, d’identification et d’isolement des personnes contaminées, de limitation des transports et de renforcement des services sanitaires. Englués dans les politiques néolibérales avec lesquelles ils tentaient de contrer le ralentissement économique, les gouvernements capitalistes ont tardé à les prendre, puis les ont prises insuffisamment, ce qui les a contraints à en prendre ensuite de plus sévères, sans arrêter pour autant de courir derrière la propagation du virus. Le zéro stock, l’austérité budgétaire dans les domaines de la santé et de la recherche et la flexi-précarité du travail doivent être mises en accusation à l’occasion de la crise.Des scientifiques ont tiré la sonnette d’alarme lors de l’épidémie du coronavirus SRAS en 2002-2003. Des programmes de recherche fondamentale ont été proposés en Europe et aux USA qui auraient permis de mieux connaître cette catégorie de virus et d’en prévenir la réapparition sous de nouvelles formes. Les gouvernements ont refusé de les financer. Une politique absurde, mais taillée sur mesure pour laisser la main sur la recherche dans ces domaines à l’industrie pharmaceutique, dont l’objectif n’est pas la santé publique mais le profit par la vente de médicaments sur le marché des malades solvables.Comme tout phénomène disruptif, l’épidémie suscite d’abord des réactions de déni. Celles-ci peuvent ensuite céder le terrain à la panique et la panique peut être instrumentalisée par des complotistes et autres démagogues pour faire le jeu de stratégies autoritaires de contrôle technologique des populations et de limitation des droits démocratiques, comme en Chine et en Russie. Il y a en plus un risque sérieux que le Covid-19 soit utilisé par les fascistes comme prétexte pour justifier et intensifier les politiques racistes de refoulement des migrantEs.
Les mouvement sociaux doivent prendre les choses en main
La gauche ne peut absolument pas se contenter de rabattre le facteur exogène de la crise sanitaire sur la crise économique capitaliste endogène. Elle doit prendre en compte la crise sanitaire en tant que telle et développer des propositions pour la combattre de façon sociale, démocratique, antiraciste, féministe et internationaliste. À contre-courant de l’individualisme, elle doit aussi adopter pour elle-même et propager dans les mouvements sociaux des comportements collectifs responsables du point de vue de la non-propagation du virus. À la différence des mesures de limitation de l’usage de la voiture prises par certains gouvernements en réponse au « choc pétrolier », par exemple, nul ne peut se soustraire ici à sa responsabilité par rapport à la santé : la sienne, celle de ses proches et la santé publique, sans oublier la responsabilité par rapport au Sud global. Ou bien les mouvements sociaux prennent cette question en main eux-mêmes, démocratiquement et à partir des réalités sociales des dominéEs, ou bien les dominantEs imposeront leurs solutions liberticides.Le danger majeur de l’épidémie est le possible dépassement du seuil de saturation des systèmes hospitaliers. Il entraînerait inévitablement une aggravation du tribut payé par les plus pauvres et les plus faibles, en particulier parmi les personnes âgées, ainsi qu’un report des tâches de soins dans la sphère domestique, c’est-à-dire en général sur le dos des femmes. Le seuil dépend évidemment des pays, des systèmes de santé et des politiques d’austérité-précarité qui y ont été imposées. Il sera atteint d’autant plus vite que les gouvernements courent derrière l’épidémie au lieu de la prévenir. L’épidémie requiert donc clairement une rupture avec les politiques d’austérité, une redistribution des richesses, un refinancement et une dé-libéralisation du secteur de la santé, la suppression des brevets dans le domaine médical, la justice Nord-Sud et la priorité aux besoins sociaux.
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