La politique des directions des confédérations, combinant les journées d’action sans perspective et la recherche du dialogue social, désoriente et démobilise.
C’est pour défendre « l'emploi, le pouvoir d'achat et les services publics » que les huit syndicats (CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC, FSU, Solidaires et Unsa) appelaient, samedi 13 juin, à une cinquième journée de mobilisation, sans grève. Les ouvriers du livre, qui avaient appelé à cesser le travail, ont cependant empêché la parution de la plupart des quotidiens nationaux. C’est bien la seule perturbation notable d’une journée que la grande majorité des travailleurs a ignoré. Pourtant, le mécontentement demeure, s’approfondit et n’a nullement été impressionné par la prétendue victoire de la droite aux européennes.
Les luttes contre les licenciements continuent. En témoigne la séquestration de quatre dirigeants de la papeterie Malaucène dans le Vaucluse. La grande majorité de l’opinion (74% selon les sondages), reste favorable aux mobilisations, face à l’aggravation du chômage (187800 emplois supprimés au premier trimestre 2009, selon l’Insee). Face aussi à l’arrogance de Sarkozy, qui refuse même un coup de pouce au Smic et annonce de nouvelles attaques. Ce qui est en cause, c’est bien la politique des grandes confédérations, qui veulent à tout prix éviter un affrontement avec le pouvoir et s’enferment dans le piège du dialogue social. Jean-Claude Mailly (FO) a essayé de capter la grogne suscitée par cette politique: « Les manifs à répétition, ce n'est pas notre tasse de thé, parce qu'il y a un peu un phénomène d'usure des salariés. » Certes, mais la rivalité avec la CGT ou la CFDT ne fait pas une politique répondant aux besoins de la situation.
C'est bien là la discussion qui s’ouvre dans les organisations syndicales, comme parmi les salariés qui refusent de payer la crise. Comment mettre en œuvre une politique qui, en combinant les grèves locales, leur convergence, les actions nationales, construise un mouvement d’ensemble dans l’objectif de faire céder le pouvoir?
On ne peut, dans le même temps, se prêter au petit jeu de la concertation avec le patronat ou le gouvernement et développer une offensive pour les faire céder. Deux jours avant le 13 juin, s’ouvraient les discussions avec le Medef sur la « gestion sociale des conséquences de la crise sur l'emploi ». La même semaine, Sarkozy recevait les dirigeants des confédérations, sans d’autre raison que de défendre sa propre politique. Début juillet, ils se rencontreront de nouveau pour faire « un bilan d'étape » des mesures gouvernementales contre la crise discutées lors du sommet social du 18 février. Ce bilan, tout le monde le connaît, il est inacceptable. François Chérèque (CFDT) parle de « risques d'embrasement », sans doute pour convaincre le gouvernement de faire des gestes. Mais le pire serait que la révolte reste sans politique.