Les appels à combattre l’état d’urgence se multiplient, que se soit à travers des pétitions, des réunions, ou des projets de manifestations. Loin de se laisser intimider, le mouvement social reprend la rue. Pour preuve, les migrantEs – un temps invisibilisés – réoccupent la place de la République pour y exprimer l’urgence à répondre à leurs revendications. Jeudi 17 décembre s’est aussi tenu un meeting plein de promesses.
Al’initiative de « l’appel des 58 » composé de personnalités du monde culturel, intellectuel, et de responsables politiques et syndicaux, s’est donc tenu une importante réunion publique à la Bourse du travail de Paris. Cet appel, rappelons-le, faisait suite à l’interdiction de manifester en soutien aux migrantEs le 22 novembre dernier et avait été suivi de 58 convocations et gardes à vue.Le matin même, avant le meeting, au cours d’une conférence de presse tenue dans ses locaux, la LDH rendait public un autre appel signé par une centaine d’organisations exigeant du gouvernement de rétablir sans délai le droit plein et entier à manifester, de cesser les perquisitions et assignations à résidence arbitraires, de lever l’état d’urgence, et de renoncer à une réforme constitutionnelle au contenu inacceptable.Des revendications qui ont aussi été largement développées tout au long de la soirée par les différents intervenants.
Contre la casse sociale et le climat réactionnaire
Très applaudi, Sergio Coronado, l’un des 6 députéEs ayant voté contre l’état d’urgence à l’Assemblée nationale, réaffirmait son opposition à la révision de la constitution qui sera présentée mardi 23 décembre par le gouvernement. Laurence Blisson, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature, dénonçait les 3 000 perquisitions abusives et les assignations à résidence, dont deux activistes écologistes présents au meeting ont été victimes. Patrick Picard, secrétaire général de l’union départementale de la CGT Paris, dénonçait la « violence politique » du pouvoir qui, de l’usage du 49-3 pour imposer son programme de casse sociale à l’application des mesures contenues dans l’état d’urgence, attaque les libertés fondamentales de notre camp social.Intervenant au nom de « l’appel des 58 », notre camarade Olivier Besancenot a appelé à braver l’état d’urgence en défendant le droit de manifester. Il a également insisté sur la nécessité de faire converger les multiples initiatives qui se développent contre l’état d’urgence. Faisant notamment échos aux interventions du représentant du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), de Sihame Assbague du collectif contre les contrôles au faciès, d’Anzoumane Sissoko pour l’Union nationale des sans-papiers (UNSP), il a en particulier dénoncé le climat réactionnaire ambiant, les violences qu’exerce l’État contre les jeunes des quartiers populaires, les sans-papiers et les migrantEs.
Des thèmes qui avaient également été développés lors d’un meeting « Pour la dignité, contre la guerre, contre l’état d’urgence » qui s’était tenu à Saint-Denis une semaine plus tôt et auquel plusieurs organisations avaient aussi participé, ainsi que 700 personnes.Intensifier et unifier le combat !
En quelques semaines, la prétendue unanimité nationale autour de l’état d’urgence a volé en éclats. Les assignés à résidence en appellent au Conseil constitutionnel, et l’exécutif, contesté jusqu’au sein du PS, se voit obligé de retirer son projet de loi sur la déchéance de la nationalité sous la pression de la contestation et des manifestations du mouvement social. Et la spectaculaire hausse de la côte de popularité enregistrée par Hollande après les attentats retombe aujourd’hui tel un soufflé. Mais le compte n’y est pas !Les appels pour la levée de l’état d’urgence se multiplient. Ainsi, la pétition autour de « l’appel des 333 » a recueilli plus de 10 000 signatures et entend tenir un meeting le 31 janvier. « L’appel des 58 », quant à lui, appelle à développer la mobilisation, en ne renonçant à aucune des échéances qu’exige le mouvement social. Il appelle à une manifestation nationale lors du vote de la loi à l’assemblée le 7 février prochain.
Les anticapitalistes entendent prendre toute leur place dans la préparation de cette échéance. Ils défendront l’urgence de l’unité la plus large pour y parvenir. Outre l’exigence de la levée de l’état d’urgence et la défense des libertés, il existe aujourd’hui un consensus suffisamment large pour tenir des échéances communes autour de thèmes tels que le soutien aux migrantEs, le lutte contre la stigmatisation des jeunes des quartiers populaires.
Alain Pojolat