Soutenus par Jean-François Copé, 80 députés UMP viennent de lancer un appel pour supprimer des nouveaux programme du lycée et des manuels de sciences de la vie et de la Terre (SVT) l’enseignement du thème « masculin/féminin », reprenant un appel d’associations familiales catholiques et de Christine Boutin. Ils prétendent que les nouveaux programmes ne reposent pas sur des faits « scientifiquement prouvés ». Cette démarche a été initiée dès fin mai, avec un appel au boycott lancé par le secrétaire général adjoint de l’enseignement catholique, Claude Berruer, alors que l’enseignement catholique sous contrat a pourtant obligation de respecter les programmes officiels ; c’est d’ailleurs pour cela qu’il profite de 7 milliards d’euros de financement public par an. Thibaud Collin, professeur au lycée catholique Stanislas, déclarait ainsi : « La prime à l’indifférenciation sexuelle promeut en fait l’homosexualité ». Ils sont rejoints par les réseaux évangélistes. Luc Chatel, ministre de l’Éducation, refuse de soutenir clairement l’utilisation de ces nouveaux manuels et défend le programme du bout des lèvres. Cela revient à donner raison aux plus conservateurs.
Ces programmes présentent à juste titre l’identité sexuelle comme construction biologique ET sociale. Ils ne font que reprendre des faits largement démontrés et visent à lutter contre les préjugés homophobes et sexistes. Dès 1949, Simone de Beauvoir démontrait dans Le deuxième sexe qu’ « on ne naît pas femme, on le devient ». En réalité, cet appel ne fait que reprendre les pires discours réactionnaires. Le député UMP Lionnel Luca ne s’encombre pas des sciences lorsqu’il déclare sur France Inter que « la " théorie du genre ", si elle avait existé du temps d’Adam et Ève, ne nous permettrait sûrement pas d’être là aujourd’hui ». Avec une telle vision archaïque, c’est bientôt l’enseignement de la théorie de l’évolution qu’ils vont remettre en cause puisque, selon les créationnistes, elle n’est pas « scientifiquement prouvée »...
Cette attaque de la Droite populaire vise à relayer la vision rétrograde, homophobe et sexiste, afin de regagner l’électorat de Sarkozy séduit par Marine Le Pen. Alors que les attaques sur l’école ne cessent de se multiplier et que l’UMP est en crise, la droite essaye de créer une fausse polémique. La droite de l’UMP se lance dans une stratégie du type « Tea party » aux USA : libéralisme économique et nationalisme, combiné à un discours réactionnaire et obscurantiste. Au contraire, il est essentiel que se développe, tout au long de la scolarité, une véritable éducation à la sexualité, afin de combattre les idées dominantes et les préjugés liés aux sexes des individus et les normes hétérosexuelles présentes dans la société. Cette question du sexe, du genre, de la sexualité ne doit d’ailleurs pas rester cantonnée au seul enseignement en SVT. Cette polémique risque de se faire au détriment des jeunes qui sont les premières victimes de ces normes. N’oublions pas que selon une étude de l’Inserm de 2005, les garçons homosexuels ont treize fois plus de risques de faire une tentative de suicide que les jeunes hétérosexuels. Il faut dès maintenant élargir la mobilisation contre tout retrait des manuels ou modification du programme actuel sur cette question. Un recul sera la porte ouverte à d’autres attaques contre les aspects progressistes des programmes scolaires.
Antoine Boulangé