Publié le Vendredi 22 novembre 2013 à 18h04.

Projet de loi: les prostituées, victimes et coupables ?

Une proposition de loi disant vouloir « renforcer la lutte contre le système prostitutionnel » vient d’être déposée à l’Assemblée Nationale par le PS. À sa lecture, le NPA réaffirme l’approche politique qui l’a amené en juillet à signer avec 100 autres associations et organisations le Manifeste contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients.

Présentée comme la solution à la question prostitutionnelle, la pénalisation des clients – mesure-phare du projet de loi – a pourtant été rejetée par des associations féministes comme le Planning familial, ou de santé, comme Médecins du Monde. Malgré l’équation rhétorique qui accompagne le projet de loi affirmant que « s’attaquer à la demande fera baisser l’offre », cette mesure renforcera en réalité le pouvoir des clients. En effet, loin d’améliorer la situation des personnes en situation de prostitution, cette option l’aggrave. La clientèle menacée de contravention fera pression pour qu’elles se cachent toujours davantage. Cette mesure les rendra donc plus précaires et vulnérables, et dégradera encore leurs possibilités d’imposer des conditions comme le port du préservatif, ou de se protéger des violences des clients et de la police.

Epée de DamoclèsDe plus, si ce projet introduit l’idée de délivrer un titre de séjour temporaire de 6 mois aux personnes s’engageant à sortir de la prostitution, le gouvernement met en même temps une épée de Damoclès au-dessus de leur tête. Il prépare de nouvelles expulsions, en interdisant le retour à la prostitution (sous peine d’expulsion), tout en les maintenant dans une extrême précarité, avec un titre de séjour de 6 mois, et une aide de moins de 500 euros par mois.En cela, il serait assisté par les associations de « soutien » aux prostituées, qui auraient à charge de les surveiller ! Non seulement la mise en place d’un contrôle politique, social et policier sur des femmes précaires et étrangères est inacceptable (cela instaure un état d’exception par rapport aux prostituéEs françaises) mais que des associations acceptent de faire ce travail le serait tout autant.Les prostituées, victimes et coupables ? Il serait temps que le gouvernement sorte de sa démarche paternaliste et répressive, et apporte des réponses utiles à l’ensemble des personnes en situation de prostitution, à commencer par le soutien politique et financier aux associations communautaires et de santé et celles qui luttent pour leur permettre d’obtenir la régularisation. Car si la traite se développe, c’est sur la fermeture des frontières et les politiques migratoires assassines. Pour lutter contre les réseaux, il faut d’abord régulariser toutes les sans-papierEs !

Chloé Moindreau