« Nous vivons dans un État policier ! »... Ce slogan chanté dans les manifestations sur l’air du joyeux « Yellow Submarine » des Beatles exprime en une formule l’état d’esprit qui règne dans les cortèges : la lucidité, et la détermination.
ChacunE est conscient qu’aujourd’hui, dans la France de Cazeneuve, manifester, c’est risquer d’être gazé, matraqué, blessé par une grenade de désencerclement ou mis en garde à vue. Loin de dissuader les opposantEs à la loi travail, les brutalités policières n’ont pour seul effet qu’obliger ces derniers à s’équiper en conséquence. Foulards, lunettes de piscine ou casques de chantiers deviennent la panoplie indispensable pour pouvoir manifester.
Rassemblement policier, le grand fiasco !
Annoncé et médiatisé jusqu’à outrance, le grand raout du mercredi 18 mai lancé par Alliance police a fait flop. Sur une place de la République interdite au public dès 9 heures, les quelques centaines de flics parisiens étaient moins nombreux que les unités de gendarmerie venus assurer leur « protection »... Censée répondre au « Tout le monde déteste la police » scandé dans les manifestations, ainsi qu’aux deux affiches de la CGT dénonçant les violences policières, l’initiative ne reçut pour tout soutien que ceux des Identitaires, de la Ligue de défense juive (LDJ) et la visite (surprise ?) de Marion Maréchal (nous voilà) Le Pen, ovationnée comme il se doit et se livrant avec ferveur à une séance de selfies.
En dépit de l’incroyable dispositif policier mis en place, près de 300 personnes ont réussi à se rassembler aux cris de « La place elle est à qui ? Elle est à nous ! » ou « À bas l’État policier ! » Après avoir été gazés et refoulés par les gendarmes, les manifestantEs sont partis en cortège sauvage vers le canal Saint-Martin, rencontrant sur leur chemin une voiture de police par la suite incendiée. Les manifestantEs ont ensuite rejoint le cortège des cheminots à gare de l’Est, puis la manifestation contre la prolongation de l’état d’urgence sur une place de la République réinvestie à nouveau par Nuit debout.
Ça frappe tous azimut !
Le soir même, puis le lendemain matin, 4 militants antifascistes ont été mis en examen pour « tentative d’homicide volontaire », passible d’un déferrement devant une cour d’assises, sur la seule base de leur participation à la manifestation parisienne du mercredi 18 mai. Comme le soulignent leurs avocatEs, le dossier est totalement vide, et aucun élément n’indique leur participation aux faits incriminés. Ces 4 militants sont bien victimes d’un acharnement policier et judiciaire hors du commun.Mardi 17 mai à Lille, en pleine manifestation contre la loi travail, un jeune militant de la CGT a violemment été interpellé pour de prétendues violences envers les forces de l’ordre. Mis en garde à vue et déféré au parquet, il refuse la comparution immédiate pour préparer sa défense... Le « juge des libertés » a ordonné sa mise en détention jusqu’à son procès. Le même traitement avait été réservé à un militant de la CGT de Clermont-Ferrand le 29 avril dernier pour avoir participé dans le cadre d’une action de Nuit debout à l’occupation de la mairie...
Jeudi 19 mai à Rennes, 19 militantEs ont été mis en garde à vue et déférés au parquet... pour avoir tenté de neutraliser les bornes d’accès au métro afin d’en assurer la gratuité. Inculpés pour « dégradations et association de malfaiteurs » !Et à Nantes, un lycéen est également en détention provisoire pour de prétendues violences contre la police.
Organiser la riposte
Le mouvement social et syndical ne peut rester l’arme au pied devant la dérive autoritaire et répressive du pouvoir. Piquets de grève, manifestations et occupations sont quotidiennement confrontés à une répression brutale. Les violences policières sont systématiques, les procédures judiciaires arbitraires, et le plus souvent sous pression policière.Outre le retrait de la loi travail, le mouvement doit assumer la prise en charge d’une plateforme anti-répression exigeant la libération de tous les prisonniers en relation avec la mobilisation actuelle ; l’arrêt des poursuites judiciaires ; le retrait des « forces de l’ordre » de nos manifestations ; l’interdiction des gazages massifs et systématiques des manifestations ; l’interdiction des flashballs et des LDB40.
Alain Pojolat