Publié le Vendredi 24 novembre 2023 à 15h00.

Souscription : l’État, l’argent et nous

À l’heure de notre souscription annuelle, rappel sur l’aide indirecte et directe de l’État aux partis et leurs implications.

Le financement des partis politiques est très encadré par la loi, et c’est tant mieux ! Il n’en reste pas moins injuste pour les partis politiques petits comme le nôtre qui ne disposent par ailleurs pas d’éluEs nationaux. 

La réduction fiscale, aide publique indirecte

Le NPA vit aujourd’hui de ses seuls dons et cotisations. Ces derniers font l’objet d’une aide publique indirecte sous la forme d’une réduction fiscale de 66 %. L’économiste Julia Cagé a très bien décrit l’injustice produite par le caractère anti-distributif de cette niche fiscale (le Prix de la démocratie, Fayard, 2018). En l’occurrence, le financement des partis via les dons et cotisations est l’affaire d’une petite minorité de contribuables aisés, voire richissimes, qui de surcroît accaparent l’essentiel du butin fiscal. Sans compter que les plus gros contributeurs versent évidemment leur obole à un petit nombre de partis satisfaisant leurs intérêts. Si les réponses élaborées par Julia Cagé sont discutables, son diagnostic reste néanmoins sans appel : l’argent des riches va aux partis des riches, le tout subventionné par les pauvres.

Malgré cette injustice, l’effet de cette niche est suffisamment puissant pour que le NPA se voit obligé d’y recourir. Récupérer 66 % d’un don ou d’une cotisation est intéressant, même pour des donateurs aux revenus relativement modestes. Et pour une organisation au budget limité, permettre à chaque contribution d’être augmentée par l’effet multiplicateur de ce mécanisme est indispensable.

Les élections législatives, aide publique directe

Si l’aide publique indirecte est injuste, sa forme directe l’est encore plus. Ainsi, les fonds sont attribués aux partis en fonction de leurs résultats aux législatives. À l’image d’un système de casino, seuls les très gros y raflent la mise. Sur le papier, le ticket d’entrée n’est pas très élevé. Il faut dépasser les 1 % dans au moins 50 circonscriptions réparties sur 30 départements. Mais en réalité, il faut se présenter dans des centaines de circonscriptions et y dépasser les 5 % pour que l’aide publique directe devienne substantielle et ne serve pas seulement à rembourser les copieux frais de campagne. De plus, cette aide court sur cinq ans, produisant une sorte de rente. Par ailleurs, les éluEs peuvent reverser à leur parti une grande partie de leur très généreuse rémunération... tout en bénéficiant de la réduction fiscale. Ou comment gagner au tirage et au grattage !

Compte tenu de ses très faibles scores, puis de sa quasi-absence aux élections législatives, et n’ayant a fortiori aucunE députéE, le NPA ne touche aucune aide publique directe depuis 2012. Mais si le NPA était en capacité d’obtenir de bons scores et même des éluEs aux législatives sur la base d’une orientation juste, une telle aide publique serait la bienvenue. Pour un parti comme le nôtre, dont la présence dans les institutions est instable et ne va pas de soi, l’usage d’une telle manne serait alors concentrée sur l’acquisition de biens durables, et surtout de biens immobiliers.

Les droits... et les devoirs !

La Constitution garantit un fondement de liberté d’exercice aux partis politiques par son article 4. En comparaison de la plupart des pays où il n’existe aucune règle, et au prix d’une très longue maturation, le système français de financement des partis permet aujourd’hui de grandement limiter les dérives de toutes sortes. Il n’en reste pas moins qu’il conserve des aspects profondément inégalitaires et que son caractère de plus en plus intrusif pourrait finir par prendre sa place dans la réduction générale des libertés démocratiques.

En effet, si la législation relative au financement des partis offre certains « droits », il impose en regard les inévitables « devoirs ». En l’occurrence les dépenses mais surtout la collecte des ressources sont très encadrées a priori et contrôlées a ­posteriori. La dépendance vis-à-vis de l’État passe ainsi par les aides dont il peut être difficile, voire impossible, de se passer mais aussi par l’étendue du contrôle comptable qui lui offre un niveau d’information et de rétorsion important.

Notre vision marxiste de la nature de classe de l’État devrait idéalement nous imposer une totale indépendance vis-à-vis de lui. Cependant, le type de parti que le NPA incarne, à la fois unitaire et révolutionnaire, radical mais ouvert, nous autorise et même impose une indépendance relative aux institutions. Ainsi, et parce que les questions financières sont profondément politiques, les possibilités offertes par le système de financement des partis sont suffisamment intéressantes pour que l’on adopte une approche souple mais consciente des dangers.

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