Publié le Dimanche 6 mars 2022 à 18h00.

Extrême droite : sous différents visages, toujours le même ennemi pour les femmes !

Longtemps, les partis d’extrême droite, à commencer par le Front national, ont attiré essentiellement des hommes, dans leurs rangs et leur électorat. Mais depuis que Marine Le Pen a succédé à son père, elle a réussi à proposer un visage plus « rassurant », faisant croire à une rupture avec les outrances racistes, sexistes et homophobes de son parti.

Depuis 2012, on estime que l’électorat frontiste est composé pour moitié de femmes. Pourtant la politique du RN reste évidemment en opposition totale avec les droits des femmes : par exemple, malgré un prétendu changement sur la question de l’IVG (Marine Le Pen déclarant ne plus s’opposer à son remboursement), tous les eurodéputés du Rassemblement national ont systématiquement voté contre les textes concernant les droits à la contraception et à l’avortement en Europe.

« Il y a un lien entre le pouvoir et la virilité »

Cet enfumage du RN s’est encore accentué avec la candidature d’Éric Zemmour, concurrence dont Marine Le Pen doit se démarquer : elle voudrait se faire passer pour la « modérée » des extrémistes, en reléguant Zemmour dans une extrême droite infréquentable, dont elle a cherché à s’extraire médiatiquement.

Facile face à Zemmour, qui s’affiche clairement antiféministe, avec des déclarations comme : « Je pense qu’il y a un lien entre le pouvoir et la virilité. Les femmes n’incarnent pas le pouvoir. » Accusé d’agressions sexuelles par plusieurs femmes, il a évidemment critiqué le mouvement #metoo en le comparant à la délation sous l’occupation nazie. Et ce discours trouve des auditeurs, rassurant les mâles bousculés par les (si lents) changements de société, et notamment la place prise par le combat contre les violences sexistes et sexuelles. Zemmour est une parfaite illustration du « backlash », ce retour de bâton qui accompagne toutes les avancées sociales et qui s’appuie sur les frustrations des dominants à perdre quelques-uns de leurs privilèges.

La timide évolution des rôles paternels et maternels lui semble un danger pour notre civilisation, et Zemmour annonce : « Nous créons des générations d’impuissants, d’homosexuels et de divorcés ». Évidemment, l’homophobie s’articule avec la haine sexiste. Quant à la dénonciation du divorce, elle montre un recul réactionnaire qui peut sembler inédit, mais qui parlera aux groupes masculinistes et aux cathos intégristes révélés avec La Manif pour Tous, et qui ont pu être déçus par la « tiédeur » affichée de Le Pen sur ces ­questions sociales.

Toutefois, Zemmour a pris conscience qu’il ne pouvait se passer de la moitié de l’électorat que sont les femmes (eh oui, elles ont le droit de vote !) et a créé un groupe « Les femmes avec Zemmour » pour tenter de policer son image de misogyne.

Fémonationalisme

On retrouve dans cette démarche exactement la même tentative que celle de Marine Le Pen, dans un courant plus large que l’on appelle « fémonationalisme ». Il s’agit d’instrumentaliser les droits des femmes, au profit des traditionnelles obsessions de l’extrême droite : le racisme et l’islamophobie. Peu importe que tous les chiffres montrent que les violences et les féminicides touchent tous les milieux et toutes les populations : l’extrême droite ne pointera que les agressions commises par un agresseur racisé. Elle ne mettra jamais en cause les processus de domination, inhérents à notre société capitaliste, en défendant au contraire les rôles « masculins » et « féminins » qui contribuent à pérenniser les inégalités. De leur point de vue, pour faire face à leur délire de « grand remplacement », il faudrait que les femmes (blanches) fassent des enfants, et leurs discours sur les droits reproductifs sont très ambigus.

Leur « féminisme » n’est donc qu’une imposture, et c’est fort heureusement que les tentatives d’infiltration comme récemment avec le collectif « Nemesis » ont été déjouées par les féministes qui les ont virées des ­manifestations. Restons vigilantEs !