Le Vietnam, royaume indépendant depuis le 10e siècle, après un millénaire de domination du grand voisin du Nord, la Chine, a été colonisé par la France à la fin du 19e siècle. En 1945, profitant du vide laissé par le départ des troupes japonaises qui occupaient le pays depuis 1940, le PCV (Parti communiste vietnamien, fondé en 1930 par Ho Chi Minh) proclame l’indépendance du Vietnam.
L’impérialisme français reconquiert militairement sa colonie : c’est la guerre d’Indochine (500 000 morts). Après le désastre militaire de Dien Bien Phu en 1954, la France est contrainte de partir. Le pays est alors coupé artificiellement en deux, de part et d’autre du 17e parallèle : le Nord « communiste » (capitale Hanoï), le Sud néocolonial (capitale Saïgon).
Une guerre impérialiste d’endiguement du communisme
Le PCV, soutenu militairement par l’URSS et la Chine, veut poursuivre la guerre de libération nationale jusqu’au bout. Les USA (États-Unis d’Amérique) veulent, à la suite de la guerre de Corée (1950-1953), en cette époque de « guerre froide », « endiguer » le danger « communiste ». C’est la guerre du Vietnam (1955-1975, 3 millions de morts).
La « vietnamisation » du conflit prônée par les USA ne marchant pas, ceux-ci interviennent de plus en plus directement : 15 000 soldats en 1963, 185 000 fin 1965, 536 000 en 1968 sous la présidence du démocrate Johnson. Ils mettent en œuvre une stratégie dite de « contre-insurrection » : flicage de la population regroupée dans des « hameaux stratégiques », opérations coup de poing en zone ennemie, bombardements massifs (les USA ont lâché durant la guerre du Vietnam trois fois plus de bombes que durant toute la Seconde Guerre mondiale). Sans oublier l’épandage de défoliant, le tristement célèbre « agent orange », qui a fait un million d’handicapés et qui continue, des années après, à empoisonner le sol et l’eau.
Une défaite majeure de l’impérialisme
En 1973, sous la présidence républicaine de Nixon, les USA quittent le Vietnam. L’élément décisif qui a fait basculer la situation est le mouvement anti-guerre aux USA. L’opposition à la guerre, portée initialement par des organisations trotskistes comme le SWP, se développe au fur et à mesure de l’engagement terrestre des USA et gagne la majorité de l’opinion publique américaine en 1968. Plusieurs facteurs jouent : l’engagement d’artistes (Joan Baez, Jim Morrison) et de leaders afro-américains (Martin Luther King), l’offensive du Têt en 1968 qui montre que les USA ne sont pas en train de gagner la guerre contrairement à la propagande officielle, la révélation de crimes de guerre américains (My Lai en 1968), des pertes américaines importantes (60 000 soldats tués et 150 000 blessés).
Le régime fantoche du Sud s’effondre et le PCV réunifie le pays en 1975. La « théorie des dominos » redoutée par les USA s’applique : les partis communistes prennent le pouvoir dans les pays voisins du Vietnam, Laos et Cambodge. La leçon, c’est qu’une guerre d’occupation contre un peuple ne peut pas être victorieuse à terme. La France avait connu le même sort en Algérie (1954-1963), les USA l’expérimenteront aussi en Irak (2003-2011).
Un formidable encouragement pour les luttes anti-impérialistes
Cette défaite majeure de l’impérialisme américain met à mal son rôle de gendarme du monde. À l’inverse, la victoire du mouvement de libération national vietnamien constitue un formidable encouragement pour les luttes anticolonialistes et anti-impérialistes. « Créer deux, trois, plusieurs Vietnam », tel était le message du Che. En 1975, les colonies portugaises africaines arrachent enfin leur indépendance. En 1979, le régime pro-américain du Shah d’Iran tombe. En 1979, éclate la révolution sandiniste au Nicaragua. En 1979, l’URSS, partisane de la « coexistence pacifique » avec l’impérialisme, pousse ses pions en Afghanistan, ce qui contribuera à sa perte.
La dynamique anti-impérialiste s’enraye toutefois au début des années 1980. D’une part, les pays qui se libèrent de la domination impérialiste ne constituent pas des alternatives attractives. Les régimes qui renversent le capitalisme sont, à l’image de l’URSS ou de la Chine, des dictature bureaucratiques, c’est aussi le cas du PCV, la caricature la plus atroce étant les Khmers Rouges au Cambodge. D’autre part, l’impérialisme américain surmonte sa crise sous Reagan (1981-1989). Il stoppe l’extension de la révolution nicaraguayenne qui menace son pré carré d’Amérique centrale et il reprend progressivement ses interventions militaires, à la Grenade en 1983, au Panama en 1989, en Irak en 1991.