Comme chaque année, une série d’ateliers de l’université d’été étaient consacrés à la situation sur les lieux de travail. Il était bien sûr indispensable de faire un état des lieux en ces temps de pandémie, pour scruter à la fois les évolutions des organisations du travail mais aussi leurs effets sur les salariéEs et les ripostes existantes et à construire.
Le premier constat est que l’essentiel des évolutions des situations sur les lieux de travail sont pratiquement toujours inscrites dans les mois voire les années précédant la pandémie.
Ainsi les réorganisations, licenciements, fermetures de sites dans l’automobile sont à l’œuvre depuis le début du siècle. En Europe occidentale, les ventes de voitures ont stagné en tendance sur la même période, et la recherche de nouveaux débouchés est un impératif pour les profits. L’interdiction des véhicules à moteurs thermiques à l’horizon 2035 permet d’imposer l’achat de nouveaux véhicules électriques à des millions de personnes, même si faute d’acheteurs aux ressources suffisantes, il est peu probable que cela entraîne une relance de la production.
Droits des salariéEs mis à mal
De même, si la pandémie à permis de multiplier les attaques contre le droit du travail et plus particulièrement les droits des salariéEs, beaucoup des logiques à l’œuvre remontent aux lois Macron de 2015, loi El Khomri de 2016 (gouvernement Hollande) sur lesquelles se sont appuyées les mesures imposées par le gouvernement. Décisions par ordonnances, priorité aux mesures applicables entreprise par entreprise, réductions des pouvoirs des institutions représentatives du personnel, mesures dérogatoires en matière de congés payés, de temps de travail, de travail temporaire, restrictions des droits des chômeurEs… L’extension brutale des possibilités, de l’imposition du télétravail s’inscrivant dans la logique d’individualisation des organisations du travail, dans la destruction des collectifs de travail, c’est-à-dire aussi de possibilité de résistances collectives.
On assiste à une multiplication des PSE (plans de « sauvegarde » de l’emploi), de mise en place de dispositifs d’APLD (Activité partielle de longue durée) supposés limiter les licenciements. Si les intérimaires, les prestataires ont été et sont encore les premières victimes des suppressions de postes, la fin progressive des mesures d’aide aux entreprises risque d’augmenter gravement le nombre de chômeurEs. La multiplication des situations de télétravail cristallise les interrogations sur l’organisation et la place du travail dans la société capitaliste. Une bouffée d’oxygène pour toutes celles et ceux contraintEs à des heures de transport individuel ou collectif. Un isolement dans un lieu peu ou pas du tout propice au travail notamment pour les salariéEs, surtout femmes, contraintEs à la double tâche concomitante de travail et de garde, surveillance, soutien éducatif à un ou plusieurs enfants.
Au total, une série de décisions, de directives prises à l’emporte-pièce et qui mettent en place un droit « souple » pour le plus grand bénéfice des employeurs, et insécurisent toujours plus les salariéEs et aggravent les conditions de travail.
En même temps que l’augmentation du chômage
Une logique de continuité des conséquences de la pandémie que l’on retrouvait aussi dans l’atelier sur les licenciements, suppressions de postes, fermetures de sites. Dans la fonction publique les attaques répétées faites de suppressions de postes et de mises en cause des statuts se poursuivent. Même à l’hôpital pourtant au cœur des difficultés engendrées par la pandémie. Une illustration donnée aussi par un camarade de la SNCF, où restructuration rime avec privatisation, attaques contre le statut, dégradation des conditions de travail et du service public. Chez Sanofi, c’est la liquidation du secteur de la recherche et les suppressions continues d’emplois qui ont conduit au lamentable échec dans la course aux vaccins contre le Covid-19. Plus globalement dans le secteur privé, les restructurations suivent le cours de la course aux gains de productivité, entraînant des liquidations de sites comme l’illustre la fermeture de multiples fonderies liées à l’automobile, comme l’a évoqué un militant de Bretagne avec la Fonderie de Bretagne.
L’anticapitalisme comme solution
Pour se tourner vers l’avenir, le cycle « travail » s’est terminé sur une intervention autour du véhicule électrique. Pas d’espoir de ce côté-là. Le bilan écologique, que ce soit en matière de composants (terres rares, lithium, cuivre, cobalt) ou de consommation d’électricité, n’a rien à envier à celui des véhicules à moteur thermique. Le « greenwashing » a pour seul but de maintenir production et profits pour les grands groupes du secteur.
Les débats des différents ateliers ont illustré le manque d’échanges sur la majeure partie des thèmes abordés. Les difficultés de constructions de ripostes ont été également soulignées, que ce soit en matière de suppressions de postes, d’emploi, de fermeture de sites ou en matière de conditions de travail. Nos mots d’ordre « références » d’interdiction des licenciements, de réduction massive du temps de travail sans intensification du travail ni perte de salaire restent incontournables. Mais la nécessité des débats, des propositions, de mobilisations autour des questions de choix des productions et activités, de réorganisation drastique des espaces géographiques d’habitat et de lieux de travail, a pris de l’ampleur.