Publié le Jeudi 5 mai 2022 à 11h24.

Lettre du NPA à Lutte ouvrière suite à l’hommage à Alain Krivine

Camarades, 

Les mots sont difficiles à trouver pour exprimer, en gardant la mesure, l’étonnement et la colère ressentie par les centaines de personnes réunies samedi 30 avril pour l’hommage à notre camarade Alain Krivine.

Depuis des décennies, la LC, devenue LCR puis NPA, et Lutte ouvrière, se côtoient dans des mobilisations, discutent, polémiquent plus ou moins rugueusement, ont parfois fait des alliances électorales. Elles ont même, à une époque, envisagé de fusionner. Autrement dit des relations « normales » entre deux courants révolutionnaires respectueux, collectivement, de leurs cadres respectifs et, individuellement, de leurs militant·e·s.

C’est pourquoi nous avons été profondément heurté·e·s, blessé·e·s même, par l’intervention de Michel Rodinson, faite au nom de la direction de Lutte ouvrière. Il a en effet jugé bon d’utiliser comme tribune l’hommage que nous vous avions proposé de prononcer pour, une fois expédié le salut à la fidélité d’Alain, passer au vitriol les politiques menées par notre courant international et sa section française dont Alain a été un des dirigeants durant 60 ans. Michel Rodinson est même allé jusqu’à polémiquer sur notre orientation concernant les prochaines élections législatives, à propos de laquelle, vous nous l’accorderez, Alain n’a aucune responsabilité... 

Le tout avec une tonalité que nous ne détaillerons pas, mais volontairement insultante et méprisante, délibérément choisie pour blesser l’assistance. Cette attitude, inacceptable dans les rapports entre organisations du mouvement ouvrier, a fortiori lors d’un hommage, ne peut être vécue que comme une agression politique de votre part contre notre courant, constituant une rupture du cadre de confiance et du respect qui pouvait exister entre nous. Maintenir et justifier une telle attitude entraînerait une altération majeure de nos rapports à venir, y compris sur notre possible participation à vos futures initiatives.

Nos désaccords, que ce soit sur nos conceptions de la solidarité internationaliste, sur l’analyse de la situation ou sur les choix de tactiques électorales, sont légitimes. Nous ne nous sommes jamais dérobé·e·s à la confrontation, voire à la polémique, y compris publique, qui sont pour nous une bouffée d’oxygène indispensable à la réflexion politique. Au-delà des rapports entre nos organisations, c’est même pour nous un élément sans lequel un mouvement ouvrier vivant ne peut exister. Nous vous avions d’ailleurs proposé, suite à la séquence présidentielle, une réunion « bilans et perspectives » pour échanger sur les rapports de forces issus de cette séquence et les formes possibles d’intervention des révolutionnaires, entre autres autour des législatives. Vous avez refusé, nous renvoyant à un débat pendant votre fête, soit après la date de dépôt des listes. Dont acte.

Mais ce qui s’est passé lors de l’hommage à Alain Krivine n’a rien à voir avec la confrontation d’idées, et tout à voir avec une provocation irrespectueuse, à propos de laquelle nous nous devions de vous interpeller.

Dans l’attente d’une réponse et, nous l’espérons, des nécessaires excuses de votre part, a fortiori dans la mesure où cet incident s’est produit quelques jours après que vous nous avez invité à votre fête, nous rendons publique cette lettre, ainsi que la vidéo de l’intervention de Michel Rodinson.

Le Comité exécutif du NPA, le 5 mai 2022

 

L’intervention de Lutte ouvrière est visible sur notre chaîne YouTube (à partir de 56’ environ).