Publié le Lundi 8 mars 2010 à 21h32.

Le combat continue ! (par François Coustal)

 

Alors que la vie est de plus en plus difficile pour des millions de gens ordinaires, jamais l’arrogance du pouvoir et du patronat n’a été aussi grande. Début janvier, le gouvernement a décidé une augmentation ridicule du Smic : 0,5 %, soit 4 centimes d’euro par heure ! Par contre, les smicards seront sûrement heureux de savoir que, au même moment, la rémunération du PDG d’EDF a été augmentée de… 45 % ! Encore Henri Proglio, le nouveau titulaire du poste, comptait-il cumuler ce salaire avec les 450 000 euros annuels versés par Veolia, l’entreprise privée qu’il continue de diriger. Devant le scandale public soulevé par l’étalage d’une telle rapacité, Sarkozy et son gouvernement ont dû reculer : Monsieur Proglio devra se contenter de son salaire EDF. Soit 1,6 million d’euros par an, quand même !

Tentant de détourner l’attention de la crise sociale et des attaques en préparation, à commencer par celles concernant les retraites, le débat nauséabond sur l’identité nationale se poursuit, propice à tous les dérapages racistes. Mais Sarkozy et ses amis sont prêts à tout pour essayer, à nouveau, de capter les voix du Front national, notamment en mars prochain.

Parmi bien des sujets possibles, Tout est à Nous ! La Revue a choisi, ce mois-ci, de consacrer son dossier aux élections régionales. En contrepoint à ce dossier, Myriam Combet évoque sa propre expérience de conseillère régionale en Rhône-Alpes.

Un an après la grève générale de 47 jours organisée par le LKP, ce numéro revient sur les promesses non tenues et les mobilisations en Guadeloupe, grâce à une interview d’Élie Domota. Sans oublier la situation politique en Kanaky, toujours sous domination coloniale française. Et, bien sûr, nos rubriques sur la vie des idées…

Mais, les lectrices et les lecteurs peuvent aisément l’imaginer : ce numéro n’est pas tout à fait celui que nous avions conçu à l’origine. Le 12 janvier dernier, Daniel Bensaïd nous a quittés. Dans les pages suivantes, d’autres diront mieux que moi l’apport militant et théorique de Daniel, ce qu’il a représenté pour eux. Et pour beaucoup d’autres. Donc, juste deux souvenirs…

Paris, hiver 1970. Nous étions plusieurs milliers de manifestants à battre le pavé pour protester contre le procès de Burgos : la « justice » franquiste venait de condamner à mort six militants basques. Nous ne savions pas encore que, pour la première fois, la mobilisation internationale serait capable d’arrêter le bras des assassins. Aux abords de l’ambassade d’Espagne, le cortège a été bloqué par un impressionnant dispositif policier. Avant que la manifestation ne soit obligée de refluer sous les coups de matraques et les gaz lacrymogènes, Daniel est monté sur le toit d’une voiture et s’est adressé aux CRS : « Ce n’est pas autour d’une ambassade que vous montez la garde. Ce sont des potences que vous protégez ! »

Gourette, août 2002. Sous le chapiteau principal, le meeting de clôture de l’université d’été de la LCR a commencé. La nouvelle vient de tomber : pour inaugurer son mandat, foulant aux pieds les engagements de la France, le nouveau Premier ministre de Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin, vient de livrer à Berlusconi et à la vengeance d’État un réfugié politique italien, Paolo Persichetti. Reconnaissable entre toutes, la voix de Daniel s’élève, comme trente ans plus tôt, pour fustiger « un gouvernement de salopards, sans parole et sans honneur. Un gouvernement de merde ! »

Les motivations de l’engagement militant et révolutionnaire sont sûrement multiples et complexes, en partie personnelles. Mais, au point de départ, il y a la révolte et l’indignation. Toujours. Forcément. Chez Daniel, elles sont restées absolument intactes. Sur la durée. Jusqu’au bout. En 2004, dans Une lente impatience, son ouvrage le plus personnel, celui où il revient sur son itinéraire intellectuel et militant, il écrivait : « Bien sûr, nous avons eu davantage de soirées défaites que de matins triomphants... »

Peut-être. Sans doute.

Mais, nous avons eu la joie et la fierté d’y rencontrer et d’y côtoyer Daniel.

Et surtout, il ajoutait : « Et, à force de patience, nous avons gagné le droit précieux de recommencer » !