Sorti des presses en février 2010 (avec une préface de Claude Ribbe datée de même), l’ouvrage, selon sa couverture, « donne toutes les clés permettant de décrypter l’après-tremblement de terre » qui a frappé Haïti le 12 janvier. Le communiqué de presse en fait le « premier ouvrage complet sur cette île », un « ouvrage de référence » qui « en relate l’histoire tragique des origines à nos jours et analyse la cause de tous les maux de ce pays », en même temps qu’un « livre choc » sur « les souffrances du peuple haïtien ». C’est en réalité la traduction (non signée) d’un livre publié en 2007 sous le titre An Unbroken Agony, Haiti, From revolution to the kidnapping of a president (d’où l’un des titres courants, De la révolution à l’enlèvement d’un président). Jean-Bertrand Aristide fut à la tête de l’État haïtien durant deux mandats incomplets, (février-septembre 1991 et 1994-1995, puis 2001-2004), « président démocratiquement élu » selon Randall Robinson qui en est proche (et Claude Ribbe apparemment aussi). Ce « descendant en droite ligne de Louverture » qui « menait la vie du Christ », en « démocrate moraliste », devint le martyr des Américains et des Français décidés à punir « éternellement » ce pays d’esclaves révoltés. Il y a bien sûr quelques vérités dans cette « vie de saint », mais beaucoup plus d’omissions et de déformations. Le romancier Jean Metellus a décrit la fièvre s’emparant des exilés à chaque événement grave survenant en Haïti, et l’édition précipitée de cette hagiographie à l’usage des lecteurs francophones laisse à penser que l’ancien président garde des partisans qui jugent l’occasion du séisme bonne pour son retour. Mais, selon ce qui se dit là-bas comme ici, « les Haïtiens ont autant besoin d’Aristide que d’une rage de dents ». Gilles Bounoure
ÉDITIONS ALPHÉE, 320 PAGES, 21,90 EUROS