L’affaiblissement relatif des principales puissances impérialistes est patent : constat d’échec des États-Unis en Irak et enlisement en Afghanistan ; défaite militaire israélienne au Liban ; crise du projet européen de l’Union pour la Méditerranée ; persistance de la question palestinienne. Ce contexte général réduit leurs capacités d’intervention sur plusieurs fronts pour stabiliser des dictatures relais. De plus, les pays dominants sont eux aussi confrontés à une grande instabilité sociale et économique ; ils subissent le réalignement en cours des rapports de forces internationaux, lié à la montée en puissance de l’impérialisme chinois, de même que d’autres économies émergentes ; et ils disposent de capacités d’intervention plus limitées pour garantir le maintien de rapports de forces géostratégiques favorables. La défense de leurs intérêts repose sur des capacités plus étroites : il leur faut abandonner tel ou tel dirigeant subordonné pour essayer de contrôler les changements.
Nous sommes dans une situation où l’intensification de la crise de l’impérialisme laisse libre cours à l’aggravation des contradictions des sociétés dominées. Certains maillons de la chaîne impérialiste de domination sont fragilisés, tandis que les classes dominantes de la périphérie ont de plus en plus de peine à anticiper les soulèvements populaires et à y faire face.
La crise économique mondiale produit ses effets les plus dévastateurs là où la situation des classes laborieuses est déjà la plus difficile. Et ceci d’autant plus que les acquis des luttes ouvrières d’Europe, et dans une moindre mesure des USA, freinent le report immédiat et brutal des effets de la crise sur les plus démunis : assurance chômage, salaire socialisé (santé, éducation, etc.) ne sont pas par hasard la cible des politiques de régression appliquées depuis 30 ans. De plus, la grande faiblesse des droits syndicaux et politiques rend les conditions de la résistance bien plus difficiles… et explosives dans les pays dominés.
Mais quelles sont les marges de manœuvre de ceux qui veulent d’un «changement» qui ne change rien ? En effet, dans les pays dépendants, le capitalisme en crise n’est pas soluble dans un régime démocratique, qui permette aux oppriméEs de lutter librement pour la défense de leurs intérêts. Tout juste peuvent-ils viser une façade démocratique en élargissant la cooptation des élites et la répartition des privilèges. Les interventions impérialistes visent ainsi à instaurer une démocratie politique restreinte, où les anciens groupes dirigeants qui structurent l’appareil bureaucratique et répressif de l’État composent avec de nouveaux venus. Mais cette possibilité même est limitée en raison de la faiblesse ou de l’inexistence de partis bourgeois démocratiques ou réformistes un tant soit peu enracinés, d’ailleurs rapidement discrédités par leur soutien ou participation aux «gouvernements de transition».
Loin des transitions négociées qu’ont connues plusieurs pays d’Amérique latine dans les années 1980 -1990, la poussée révolutionnaire entretient la pression sur les processus politiques d’en haut, même quand elle semble refluer. L’irruption du mouvement populaire permet de comprendre les limites des replâtrages en cours.
En retour, la développement des révolutions dans le Maghreb et le Moyen-Orient affaiblit le système (voir Les enjeux régionaux et nos tâches, p.13). L’impérialisme doit faire face à la solidarité internationale entre les peuples. Celle par exemple, qui a empêché Sarkozy d’héberger Ben Ali et l’a obligé à limoger Michèle Alliot-Marie. Cette solidarité joue un rôle essentiel, et doit être nourrie de la compréhension que le succès des révolutions en cours créera les conditions d’un renversement des rapports de forces au profit du travail, dans les métropoles impérialistes.
Commission Maghreb du NPA