Durant trois jours, au théâtre des Carmes à Avignon, se tiendront du 25 au 27 octobre prochain les premières rencontres « André Benedetto » organisées par l’association Urgent crier (il s’agit du titre du premier recueil de poèmes de Benedetto). Quatre ans après sa mort, des expositions, des débats, des spectacles reviendront sur l’œuvre de ce poète, acteur et metteur en scène. Le nom de Benedetto est bien souvent associé au festival d’Avignon. C’est en effet lui qui, en 1966, créait le festival « Off », presque par hasard : il ne s’agissait pas de créer une institution parallèle ou concurrente mais de continuer à jouer pendant le festival créé par Jean Vilar. L’idée fera son chemin puisque, quarante-cinq ans plus tard, ce sont plus de 1 000 spectacles (dans des conditions économiques difficiles) qui ont été présentés cet été.Un théâtre pour le peupleMais André Benedetto, c’est bien autre chose que le « fondateur » du festival Off dans lequel l’histoire du théâtre tend à l’enfermer. Car il a consacré sa vie entière à la création d’un théâtre populaire au sens où il voulait un théâtre pour le peuple, et non pour la bourgeoisie. Mais « populaire » pour lui ne signifiait pas, comme pour tant d’autres, qu’il fallait en rabattre sur l’exigence. Il avait une conception ambitieuse et politique de ce que « populaire » devait signifier. Si la politique semble avoir été tout au long de son travail une compagne de route, la question esthétique n’en a pas pour autant été évacuée, elle était précisément « la pointe avancée d’une éthique ». Et c’est jusque dans l’écriture, dans le travail avec les acteurs, dans la scénographie, dans les poèmes, qu’il cherchait la contradiction, comme s’il avait fallu, dans chaque situation, trancher cette question brûlante : de quel côté se trouvent les forces d’émancipation, et s’y ranger, quel qu’en soit le prix.Le théâtre des Carmes, son théâtre créé il y a cinquante ans à Avignon, s’est ainsi révélé au fil des années l’espace d’où il interpellait le monde. Ainsi Napalm, en 1967, fut la première pièce sur la guerre du Vietnam. Le Petit Train de Monsieur Kamodé, en 1969, s’attaquait au démantèlement et à la privatisation des voies ferrés. Emballage, en 1970, mettait en scène et en images le livre I du Capital. Plus tard le Jeune Homme exposé revenait sur l’assassinat de Carlo Giuliani à Gênes en 2001. L’Homme aux petites pierres entouré de gros canons, sur la Palestine... Les personnages de ses pièces dessinent la source de son inspiration, celle des luttes, et il y en eut aussi quantité d’autres, anonymes… Les dizaines de pièces et de poèmes de Benedetto s’inscrivent à leur façon dans la constellation des grandes « œuvres rouges ». Olivier SamaëlRencontres André Benedetto les 25, 26 et 27 octobre à Avignon. Plus d’info sur le site : http ://www.theatredescarmes.com
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