Selon un récent sondage, commandé par Le Figaro (!), 54 % des Français estiment que les syndicats sont inutiles. Pour 41 % des sondés, le dialogue social entre patronat et syndicats n'a aucun effet concernant les réformes économiques. C'est même un frein pour 27 % d'entre eux.
68 % estiment d'ailleurs que les syndicats ne sont pas représentatifs des salariés. Toutefois, 56 % des répondants déclarent leur faire plutôt confiance pour défendre l'intérêt des salariés.
En 2012, la France avait le troisième plus faible taux de syndicalisation des pays de l'OCDE : 7,7 %, contre 6,4 % en Estonie ou 4,5 % en Turquie, mais par exemple 11,1 % aux États-Unis et 17,9 % en Allemagne.
A l’occasion des 120 ans de la naissance de la CGT, Lepaon et son équipe confédérale pensaient masquer les difficultés croissantes de la confédération à travers une commémoration consensuelle… Il n'en a rien été.
Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale et jusqu'à la scission de 1947 (débouchant sur la création de FO et l'autonomisation du syndicalisme enseignant), la CGT était quasiment la seule organisation. Elle est restée le pôle central du syndicalisme jusque dans les années 1980, décennie à partir de laquelle la CFDT s’est la mieux adaptée, dans tous les sens du terme, à l’environnement social et politique.
Patronat, dirigeants politiques et gouvernements de droite comme de gauche n’hésitent pas à regretter hypocritement la faiblesse des syndicats en France. Politologues, sociologues et autres syndicologues dissertent avec assiduité la, les crises du syndicalisme. Mais pour souscrire ou non à de telles analyses, il faut d'abord s'accorder sur la fonction du syndicalisme. Sur cette base, on peut apprécier s’il y a crise et alors, quelle crise.
Le fondement du syndicalisme est d’assurer une organisation et une représentation du salariat la plus large possible. Les textes censés fixer le cadre du syndicalisme et/ou ses rapports au champ politique (Charte d’Amiens, 21 conditions de l'Internationale communiste…) ont toujours été le produit de circonstances, de batailles menées avant tout par et entre des courants politiques. Encore aujourd’hui, l'utilisation de ces références et d'autres obéit à des raisons essentiellement tactiques et ne reflète pas de réelles conceptions du syndicalisme.
Qu’en est-il aujourd’hui de la capacité de la CGT à représenter les intérêts du salariat ? Répondre à cette question implique de s’inscrire dans une réflexion sur la reconstruction d’une conscience de classe, d’un mouvement ouvrier, aujourd'hui en profond recul.
L’objectif de ce dossier est de présenter des analyses historiques et thématiques qui éclairent les difficultés, les crises auxquelles la CGT a été confrontée, dans le cadre des évolutions profondes qui se sont produites de sa naissance à ce début de 21e siècle, afin de donner aux militantEs des outils permettant d’agir dans la voie de cette nécessaire reconstruction.
Robert Pelletier