Le 28 septembre 2010, Unilever annonce la fermeture de l’usine Fralib, près de Marseille. Les salariés sortent de neuf semaines de grève sur les salaires, dans une usine fortement syndiquée. L’équipe militante, radicale, expérimentée et combative dénonce depuis plusieurs années la politique économique et de management de la direction sur le site de Gémenos. Les ouvriers repartent en lutte et cogitent pendant le mouvement sur les retraites…
Le 3 janvier 2012, le comité d’entreprise sort un document : « Pour une solution alternative à la fermeture du site », à travers lequel, tout en revenant sur la prétendue insuffisante profitabilité de l’usine et de ses ouvrier-ère-s, les salariés affirment qu’ils sont « disponibles pour s’approprier sous une forme à définir collectivement et en concertation leur outil de travail ».
C’est la détermination d’un collectif fort créé pour lutter qui amène rapidement à la perspective d’une Scop afin de sauvegarder l’outil industriel et l’emploi, un savoir-faire accumulé pendant des générations.
Face à la volonté d’Unilever de faire craquer financièrement les salariés, face aux manœuvres en tout genre, les salariés affinent leurs propositions : une centaine d’emplois créés, une production naturelle à partir de plantes aromatiques et non avec des arômes artificiels, des contacts avec des producteurs indépendants dans le cadre d’une relation équitable, tout en favorisant une nouvelle organisation du travail où par exemple l’échelle des salaires pourrait varier de 1 à 4. Un enjeu majeur pour la pérennité de l’entreprise serait qu’Unilever cède la marque, assure le traitement de la future production et assume certains frais durant quelques années. Ce qui serait normal, après avoir profité de l’exploitation de ses anciens salariés !
En février 2012, Hollande déclare : « il faut que cette marque qui est la vôtre puisse être cédée gratuitement ». De « rencontres officielles » à la mise en place d’un « comité d’engagement » pour discuter de la revitalisation du site avec les pouvoirs public, en passant par quelques matinées devant les tribunaux et les prud’hommes, les Fralib ont finalement déposé en préfecture les statuts et présenté à la presse la dernière mouture de leur projet Scop TI1 en décembre 2012.
Le 5 février 2013, les Fralib ont quitté la réunion du comité d’engagement. La situation est pour l’instant bloquée : Unilever refuse de céder la marque Eléphant, et le préfet exige désormais des salariés un autre projet. Mais qui devrait revoir sa copie ?
1. Société coopérative ouvrière provençale Thé et Infusion : 72 salariés sont actuellement volontaires pour y participer.