S’inspirant d’une proposition similaire avancée voici plus de 30 ans par le collectif écologiste Adret (Travailler deux heures par jour, Le Seuil, 1977), le collectif altermondialiste basque Bizi ! (« vivre ! » en basque) suggère dans ce petit livre des révisions encore plus radicales des modes de vie, à l’échelle de ce pays-ci. Il suppose (c’est une de ses limites) qu’on puisse faire abstraction des interdépendances établies par la mondialisation et d’une multitude d’autres contraintes qui ne sont pas davantage évoquées, ou peut-être encore (ce qu’il ne précise pas) que le mode de production capitaliste ait été universellement aboli.
Que s’agirait-il de faire pour aboutir à cette réduction enviable du travail contraint ? De la quarantaine de milliards d’heures ouvrées qu’on enregistre annuellement en France, retrancher tout ce qui est inutile, imbécile, voire nuisible à la société comme à l’environnement, répartir équitablement les revenus, et par une politique de « décroissance » et de gains de productivité, en venir à un minimum d’une dizaine de milliards d’heures annuelles, laissant tout le temps voulu aux activités non contraintes permettant l’épanouissement des individus. Ceux-ci se répartiraient équitablement ce temps de travail contraint, entre 16 et 74 ans, ce qui porterait la population active de 25 à 42 millions et quelque de « citoyens travailleurs », astreints à ne travailler qu’une heure par jour, ou cinq heures par semaine, sauf périodes de congés payés. De la sorte, « la richesse serait partagée entre tous les membres de la communauté en échange d’une part de travail nécessaire à sa production (pour ceux qui en auraient les capacités). » Les auteurs de l’ouvrage ont bien conscience d’être ici « dans l’utopie », mais la plus décisive qui soit : « Travailler moins pour vivre autrement, c’est l’utopie qui a permis les luttes sociales, que les luttes sociales ont essayé de construire, et à laquelle nous croyons aujourd’hui ».
Gilles Bounoure
Asphodèle éditions,64 pages,8 euros