Publié le Lundi 28 novembre 2016 à 07h52.

Société générale : Pas de pitié pour les actionnaires !

L’administration fiscale a lancé une procédure pour récupérer tout ou partie du crédit d’impôt de 2,2 milliards dont a profité la Société générale (SG) en 2009 et 2010...

Avant même que la justice ne se prononce, la SG avait bénéficié du régime fiscal accordé aux entreprises victimes de fraude. Kerviel avait ensuite été condamné en 2010 et 2012 à verser 4,9 milliards à la SG, cela avant que la Cour de cassation casse les dommages et intérêts en 2014. Un nouveau procès devant la Cour d’appel de Versailles en septembre dernier a fait passer l’addition pour Kerviel à 1 million, estimant que la banque était en grande partie responsable (à 99,98 % !) de ses 4,9 milliards de perte. La Cour a estimé qu’il ne s’agissait pas de négligences mais de choix managériaux visant à privilégier le risque pour maximiser le profit. Autrement dit, la SG a joué consciemment... et elle a perdu ! Dès lors, il n’y a aucune raison que les pertes de la SG soient socialisées... alors que ses gains sont bien entendus privatisés par ses actionnaires !

Mais les capitalistes de la SG se sentent tout puissants et indiquent qu’ils mèneront une bataille judiciaire pour éviter de rembourser ce crédit d’impôt. Ils pleurnichent sur leur sort. Il est vrai qu’ils n’atteindront pas leur objectif initial d’une rentabilité sur fonds propres (« Return on equity ») de 10 % en 2016, et que leur filiale en Russie (Rodbank) est toujours déficitaire.

Taux négatifs et augmentation des tarifs...

Et surtout, le taux de rémunération des dépôts des banques commerciales à la BCE est négatif depuis juin 2014, fixé à − 0,4 % aujourd’hui. Ainsi, la BCE « punit » les banques en taxant leurs dépôts pour les inciter à accorder des crédits aux entreprises, et en contrepartie elle paye les banques pour emprunter auprès d’elle. Mais cela ne marche pas. D’une part, les banques ne peuvent pas forcer les entreprises à vouloir emprunter. D’autre part, quand elles empruntent, les entreprises le font davantage pour spéculer sur les marchés financiers que pour investir, faute de débouché rentable. Donc cette politique ne fait que gonfler la bulle financière, amplifiant l’ampleur de la prochaine récession. En outre, elle pèse sur la rentabilité des banques puisque celles-ci prêtent à des taux de plus en plus bas alors qu’elles continuent à rémunérer leurs ­déposants à des taux positifs.

Mais les actionnaires des banques n’ont pas l’intention de se laisser plumer. Ils veulent faire payer leurs salariéEs et leurs clients. Certaines banques (en Allemagne ou en Écosse) appliquent déjà des taux négatifs aux dépôts de leurs plus gros clients. Un tabou a sauté, et les banques envisagent sérieusement de taxer les comptes courants de leurs clients en cas de difficulté. En outre, elles ont déjà augmenté le tarif de certains services financiers, comme les frais de tenue de compte. À l’automne 2015, la SG a annoncé la suppression de 2 000 postes et la fermeture de 400 agences d’ici 2020. En mars 2016, 500 suppressions de postes étaient ajoutées...

La Société générale doit rembourser l’intégralité de son cadeau fiscal. Au-delà, il faut mettre les banques hors état de nuire. Pour cela, il faut exproprier l’ensemble du secteur bancaire, fermer les marchés financiers, et placer la création monétaire sous le contrôle des travailleurEs.

Gaston Lefranc