Publié le Mercredi 20 octobre 2021 à 12h00.

17 octobre 1961 : aucune excuse pour Emmanuel Macron

Des « crimes inexcusables pour la République ». C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a qualifié le massacre du 17 octobre 1961. Alors que certains espéraient que Macron franchirait le cap en employant les termes « crime d’État », le président de la République s’est contenté du service minimum en participant – une première – à une cérémonie de commémoration.

La déclaration de l’Élysée indique en outre que « les crimes commis cette nuit-là sous l’autorité de Maurice Papon sont inexcusables pour la République ». Une façon commode de dédouaner l’État de ses responsabilités en rejetant la faute sur l’épouvantail Maurice Papon. Comme si le préfet de police avait agi de façon autonome et non sous la responsabilité du ministère de l’Intérieur et donc du pouvoir. Comme l’a résumé le chercheur Olivier Le Cour Grandmaison, il s’agit « d’un petit pas qui va permettre à Emmanuel Macron de ne pas en faire un plus grand ».

Aujourd’hui comme hier, la négation des crimes policiers

On ne peut dès lors que comprendre et partager la colère qui s’est exprimée après la publication du communiqué de Macron, de la part des survivantEs du 17 octobre, de leurs proches, de leurs descendantEs, et plus largement de toutes celles et tous ceux qui refusent que ce crime colonial soit effacé de l’histoire. Mais l’on n’est malheureusement pas surpris de l’attitude de Macron et des siens, qui refusent de se confronter au passé colonial pour éviter d’avoir à assumer le présent néocolonial, et qui sont en outre sensibles à un air du temps particulièrement réactionnaire et raciste, comme en témoigne – entre autres – la zemmourisation du débat public.

Au lendemain de la déclaration de Macron, nous étions des milliers dans les rues de Paris, avec également d’autres rassemblements dans plusieurs grandes villes, pour dire notre refus de l’oubli et notre exigence de vérité, et aussi pour rappeler que les batailles de mémoire ont des enjeux très actuels. Nier la réalité du massacre du 17 octobre 1961, c’est nier la réalité de la violence coloniale dans son ensemble, et par là même délégitimer les combats anticoloniaux, passés et présents. Qui plus est, la coïncidence de calendrier qui a fait que c’est seulement trois jours avant le 17 octobre que Darmanin a annoncé vouloir déposer plainte contre Philippe Poutou, lequel avait « osé » affirmer que la police tue, a sonné comme un rappel : la négation des crimes policiers ne date pas d’hier, et certains aujourd’hui se situent dans la lignée des négationnistes du 17 octobre 1961. À ceux-là nous le répétons : nous ne cesserons jamais de nous battre contre les crimes racistes, contre les crimes d’État, et nous ne nous laisserons pas intimider, à l’instar de toutes celles et tous ceux qui n’ont jamais abandonné le combat pour la reconnaissance de ce qui s’est passé, il y a 60 ans, dans les rues de Paris, sur ordre de l’État français.