Publié le Mercredi 27 novembre 2013 à 16h15.

Philippines : désastre humanitaire et social

Au-delà du chiffre des victimes qui ne cesse d’augmenter, les Philippines vivent un véritable désastre social après le passage du super-typhon Haiyan.

Au lendemain de la catastrophe du 8 novembre dernier, le président Benigno « Noynoy » Aquino III l’avait affirmé : le super-typhon Haiyan (Yolanda) n’avait fait que très peu de victimes. Puis il avait prédit un maximum de quelque 2 500 décès. Deux semaines plus tard, le gouvernement a déjà dû annoncer 5 235 morts, 1 611  ersonnes portées disparues et environ 13 000 blessés (évaluation officielle au 22 novembre). Plus de 4 millions d’habitantEs ont été déplacés et 12 millions sont gravement affectés par le sinistre.

Une catastrophe de la pauvretéOn commence aussi à mesurer l’ampleur du désastre social. Des régions entières dévastées, c’est une économie effondrée, un chômage massif, bien peu de chances retrouver rapidement un emploi. Dans les campagnes, les plantations sont détruites, les arbres brisés, le matériel souvent inutilisable ou noyé dans les flots. Les villages de pêcheurs ont subi de plein fouet l’assaut de vagues géantes détruisant habitations et bateaux.Les survivantEs se retrouvent totalement démunis, sans espoir. Nombreux sont celles et ceux qui tentent de rejoindre des membres de leur famille établis dans des provinces qui ont échappé au cyclone le plus dévastateur de l’histoire du pays. Mais les inégalités sociales en temps de catastrophe sont criantes. Les riches — dont les résidences sont les seules à avoir parfois résisté à la violence des vents — ont des arrières solides. Les pauvres non, malgré de très vivaces solidarités familiales.Ainsi, des familles rejoignent l’agglomération de Manille-Quezon City où le mari à un emploi... Mais ce dernier vit dans un dortoir : un lit, un placard… Pas de quoi accueillir ses proches ! Ceux-ci vont donc grossir les bidonvilles, la cohorte des sans-emplois et des ultra-précaires. Ils ne recevront aucune aide gouvernementale et disparaîtront des statistiques. Les membres les mieux lotis de leur « famille élargie », les amis, tentent d’organiser des collectes en leur faveur. Les migrantEs sont une nouvelle fois sollicitéEs : ils sont 12 millions à travailler à l’étranger et l’argent qu’ils envoient régulièrement au pays joue un rôle essentiel dans l’économie philippine. Mais ces migrantEs sont pour une bonne part eux-mêmes pauvres, souvent sans papiers…

L’aide « officielle » ?Et puis il y a celles et ceux qui ne peuvent pas envisager de quitter leur quartier, leur village. L’aide « officielle » arrive maintenant dans des agglomérations sinistrées comme Tacloban, sur l’île de Leyte, où la plupart des reportages ont été réalisés. Ce n’est cependant toujours pas le cas dans nombre d’endroits plus reculés. Les associations philippines basées à Mindanao et dont nous soutenons l’action se sont rendues en zone rurale à Daanbantayan (au nord de l’île de Cebu), à Palompon et Villaba (île de Leyte) et à Ormoc City où se trouve notamment une communauté musulmane (île de Samar). En tous ces lieux, les habitantEs n’avaient encore rien reçu de la part d’agences gouvernementales, d’institutions privées ou d’organismes internationaux.Pour soutenir 850 familles victimes d’Haiyan, nos partenaires philippins font un effort considérable de mobilisation. Une coalition s’est constituée, comprenant une cinquantaine d’organisations : le Mindanao Humanitarian Action Network against Disasters (Mi-HANDs) – le Réseau humanitaire de Mindanao d’action contre les désastres. Plusieurs dizaines de militantEs sont partis dans les Visayas avec des secours pour faire face aux besoins de première nécessité et avec des équipes formées à l’aide psychosociale.Vu la situation, Mi-HANDs fait face à des frais logistiques lourds (transports). Grâce aux dons reçus, Europe solidaire sans frontières (ESSF) a déjà pu envoyer 6 000 euros ; un troisième transfert sera bientôt effectué1. L’Union syndicale Solidaires et la revue Contretemps ont relayé son appel à la solidarité. L’aide financière reste essentielle au succès de travail engagé sur le long terme par nos partenaires philippins.

Pierre Rousset1. Second bilan de l’aide apportée par ESSF disponible en ligne : http ://www.europe-solidaire.org/spip.php ?article 30401