Publié le Mercredi 14 janvier 2015 à 13h38.

Des millions contre le terrorisme et le racisme, pour la démocratie. Non à «l’Union sacrée», non aux lois sécuritaires !

L’attentat dans les locaux de Charlie Hebdo, puis la prise d’otages antisémite Porte de Vincennes, sont des actes de pur terrorisme : ils visent à provoquer la terreur et l’horreur...

La réaction spontanée, qui a mis des dizaines de milliers de personnes dans les rues dès mercredi soir, exprime d’abord le besoin simplement humain de dire ensemble la tristesse et l’attachement à la liberté d’expression. Elle exprime aussi le refus de se laisser entraîner dans la spirale redoutable voulue par les terroristes (mais pas seulement par eux) : la spirale de la peur, du rejet, de la stigmatisation, du repli sur soi.

Au-delà des manipulations, une réaction salutaireC’est une réaction salutaire et indispensable car malheureusement, immédiatement, le nombre des actes islamophobes, contre des mosquées, contre des hommes et des femmes musulmans ou supposés, contre de simples lieux de vie, s’est accru. La peur est désormais très forte, en premier lieu parmi les juifs et parmi les Arabes, et la peur est mauvaise conseillère. Dans une société déjà gangrenée par le racisme, les inégalités et les discriminations, alors que le discours raciste s’exprime de façon décomplexé jusqu’au gouvernement par la bouche de Valls, le risque est grand de voir la situation s’emballer.Au-delà des motivations très différentes, parfois contradictoires, qui ont animé les millions de manifestants du week-end, le refus de cette fuite en avant raciste était bel et bien présent. Le NPA a appelé et participé à des manifestations dans plusieurs villes, mais ne s’est pas associé à la « marche républicaine » convoquée dimanche à Paris par le gouvernement. Avec d’autres, nous avons refusé l’instrumentalisation et la manipulation orchestrée par Hollande et Valls, suivis par Sarkozy et l’UMP, dans une union nationale construite pour tenter de faire croire à des intérêts communs entre ceux d’en haut et ceux qui subissent leur politique.À l’union nationale s’ajoutait l’union internationale... Tous les « saigneurs du monde » ou leurs représentants s’étaient donné rendez­-vous pour défiler. Cette mise en scène pourrait simplement donner envie de vomir, mais il est évident qu’elle illustre au niveau national comme au niveau international la volonté des gouvernants de préparer le terrain à de nouvelles guerres, à de nouvelles attaques contre les libertés individuelles et collectives, contre les droits démocratiques. Valls parle d’une « guerre contre le terrorisme », Pécresse réclame un « Patriot Act » et, toujours plus direct, Sarkozy n’a pas hésité à parler d’« une guerre déclarée à la civilisation »...

Poursuivre le chemin, celui des mobilisationsMalgré les organisateurs de cette manipulation, nombreux sont les manifestantEs qui sont descendus dans la rue. D’autres ont refusé d’obéir à l’injonction de communion nationale. Les unEs et les autres devront se mobiliser ensemble contre toutes les mesures liberticides, sécuritaires, contre le déploiement militaire et policier et contre les opérations guerrières.L’urgence sera aussi de donner un nouvel élan aux mobilisations antifascistes et antiracistes. En effet, au-delà du jeu sinistre entre Hollande et Marine Le Pen sur la participation ou non à la manifestation, il y a fort à craindre qu’en bout de course, ce soit le Front national qui sorte renforcé de cette séquence. Les courants ultra-réactionnaires s’agitent : les islamophobes, tel les identitaires qui voudraient importer d’Allemagne les sinistres manifs « Pegida », et les antisémites, comme Soral ou Dieudonné qui se vautrent dans la théorie du complot et se réjouissent de l’amalgame entre juifs et sionistes relancé ces derniers jours par Netanyahou et le gouvernement français.Engagée depuis longtemps, la course de vitesse entre la catastrophe sociale et politique, produite par la guerre de classe menée par les capitalistes, et les capacités de résistances des exploitéEs et des oppriméEs, s’accélère brutalement. Le pire est possible. Mais beaucoup ont trouvé ou retrouvé le chemin de la rue et de la protestation collective, ont fait l’expérience de porter eux-mêmes et avec la force du nombre leur propre parole.Reste à poursuivre ce chemin en portant l’égalité des droits et l’égalité sociale, la démocratie contre la dictature du profit et les choix imposés, les libertés d’expression, d’organisation, de manifestation. Dès ces prochains jours, retrouvons notre unité, celle des exploitéEs et des oppriméEs, en étant le plus nombreux à se dresser contre la loi Macron et toutes les régressions qu’elle représente. Mais sur ce chemin-là aussi, nous devrons affronter ce gouvernement qui aujourd’hui nous fait le coup de l’unité nationale...

Christine Poupin