« Ainsi donc, l’imperdable a été perdu. L’impensable s’est imposé. L’impossible est advenu. (…) La droite, dont les idées et les valeurs n’ont jamais été aussi majoritaires dans les profondeurs du pays, cette droite à qui la victoire ne pouvait pas échapper a été, hier, sèchement éliminée », écrivait le Figaro au lendemain du premier tour de la présidentielle.
Alors que les législatives se profilent, Macron élu, la droite, incapable d’analyser le rejet dont elle a été l’objet, applique la méthode Coué pour se convaincre que cette majorité des profondeurs pourrait s’exprimer sur ses candidats. Elle ose à peine s’affirmer comme une opposition, laissant ce rôle à Le Pen. Il s’agit pour elle d’éviter l’implosion en maintenant un semblant d’unité sous la houlette de François Baroin.
Ainsi, le « chef de file du comité de campagne de la droite et du centre » tente d’élever la voix contre celles ou ceux qui seraient séduits par la victoire. « Si Bruno Le Maire, ou tout autre candidat, entre au gouvernement et s’il est candidat aux législatives », il aura face à lui « un candidat LR ou UDI ». De quoi trembler... alors que les Copé et autre NKM ne cachent pas leur sympathie voire leur attirance pour le vainqueur de la présidentielle.
Il s’agit de préserver « le compromis » de l’entre-deux-tours appelant à « voter contre Marine Le Pen », tout en précisant que l’abstention ne pouvait être un choix. Il n’est pas sûr que ce compromis tienne jusqu’aux législatives. On peut faire confiance à Macron pour appliquer les leçons de Sarkozy et pratiquer l’ouverture dès les premières nominations à son gouvernement. Les LR auront bien du mal à y résister. Et si Bernard Accoyer veut renvoyer la discussion à après les législatives, les scores électoraux auront décidé avant même que le débat ne s’engage. Entre les sirènes de Macron et les pressions du FN l’unité des LR aura bien du mal à résister et le compromis de façade à empêcher l’implosion, voire l’explosion.
Droite extrême ou extrême droite ?
« Il y a de vraies différences sur lesquelles nous ne ferons pas l’économie d’une refondation », anticipe Xavier Bertrand, ancien secrétaire général de l’UMP, pressenti comme éventuel ministre. « La question de la ligne stratégique est déterminante. Si on ne pense plus que la droite et le centre doivent occuper une place centrale, on n’a plus de raison d’exister », indique-t-il. Certes, et c’est bien là la question pour LR.
À travers les législatives vont continuer à se mettre en place les forces qui définiront les cadres d’une éventuelle future alternance. La logique du système présidentiel va permettre à Macron d’avoir une très forte majorité voire une majorité absolue. Se dessineront aussi les contours de la nouvelle force de droite extrême ou d’extrême droite qui pourrait prétendre à être l’opposition parlementaire. Autour de qui ? De quel appareil ? Fillon est fini, Marine Le Pen est dans une position très incertaine, mais des ponts entre les deux se sont construits. Jusqu’où ?
Le jeu de massacre des ambitions et appétits politiciens rivaux continue joyeusement son œuvre dans le petit monde institutionnel politicien alors que, à l’opposé, le monde du travail s’engage dans un long travail pour regrouper ses forces.
Yvan Lemaitre