Publié le Jeudi 17 avril 2025 à 20h00.

À l’Assemblée comme ailleurs, l’extrême droite met en danger les travailleurs et les travailleuses

Alors que le magazine d’extrême droite « Frontières » publiait mercredi 9 avril un dossier ciblant la France Insoumise et les collaborateurEs d’éluEs, une mobilisation intersyndicale et unitaire a permis de résister face aux menaces et aux attaques visant les salariéEs. 

Frontières, anciennement Livre Noir, est initialement une chaîne YouTube créé pour appuyer la campagne présidentielle d’Éric Zemmour en 2021. En titrant «LFI, le Parti de l’étranger», le magazine de Frontières emprunte les expressions de l’Action française antidreyfusarde. Il marche sur les traces de ceux qui, au 19e siècle, qualifiaient les défenseurEs des juifs de «judéos bolchéviques» en traitant les antiracistes d’aujourd’hui « d’islamo gauchiste ». Les temps changent, les méthodes restent. 

Des méthodes d’intimidation bien rodées

Dans ce numéro, Frontières a ciblé une quinzaine de collaborateurs et collaboratrices de députéEs de la France insoumise avec leurs noms, photos et des qualifications comme «islamistes», «black bloc», «équipe anti-républicaine», appartenance au mouvement «ultras», etc. Avec des captures d’écrans des réseaux sociaux des personnes ciblées. 

Par ses méthodes, Frontières met en danger des salariéEs précaires, avec les méthodes bien connues de l’extrême droite. En plus de mettre en danger leurs carrières, la réputation et l’employabilité de ces salariéEs, ce fichage les expose à du (cyber)harcèlement, des insultes, et à des intimidations ou des violences physiques, dont les groupuscules violents et réactionnaires se font le relais dans la rue. 

Mobilisation syndicale contre l’extrême droite à l’Assemblée nationale

Sous les dorures, l’Assemblée nationale n’est pas qu’un lieu de pouvoir, mais aussi un lieu de travail. Les attaques de Frontières visent des salariéEs qui ne disposent pas de protection comme les députéEs. Des syndicats (CGT, Solidaires, UNSA, CFDT) et associations de collaborateurEs ont appelé à un rassemblement le jour de la sortie du magazine, dans le jardin des Quatre colonnes où se trouvent les journalistes. Les revendications étaient claires : la fin de l’accréditation de Frontières dans l’enceinte Palais Bourbon et l’extension de la protection fonctionnelle aux collaborateurEs parlementaires. 

Cette mobilisation unitaire a rassemblé près de 350 collaborateurs et collaboratrices, avec des prises de parole et des drapeaux syndicaux. Des députéEs du Nouveau Front populaire étaient présentEs en soutien.

Durant le rassemblement, trois «journalistes» de Frontières se sont positionnés au-dessus des marches, filmant de manière insistante tous les collaborateurEs présentEs au rassemblement. Face au slogan «Frontières, casse-toi, l’Assemblée n’est pas à toi» scandé pendant plusieurs dizaines de minutes, ils continuaient à mettre la pression aux salariéEs. La tension est montée, et des députéEs de la France insoumise et du Parti socialiste se sont positionnéEs devant eux, les empêchant de filmer. Ils ont ensuite été exfiltrés et accompagnés hors de l’Assemblée par les services de sécurité. 

C’est une première victoire qui doit être saluée et montrer l’exemple pour faire reculer l’extrême droite sur nos lieux de travail. La mobilisation unitaire doit se poursuivre pour exiger de la Présidente de l’Assemblée des mesures concrètes face aux menaces de Frontières envers les collaborateurEs.

L’extrême droite doit être combattue syndicalement

Il est maintenant admis, à gauche, que le RN est contre les intérêts des travailleurEs. Pour preuve, les déclarations de la CGT, qui en juin dernier, avait appelé à voter pour le NFP et à se mobiliser contre l’extrême droite. Mais ce ne sont pas les seules menaces auxquelles les travailleurEs sont confrontéEs au vu des ciblages perpétrés par des groupes fascistes, à l’encontre de certainEs salariéEs ou professions. 

Déjà, le 16 février dernier, un militant de la CGT se faisait poignarder par un groupuscule fasciste à l’occasion de la projection d’un film à Paris. 

De plus, ce n’est pas la première fois que Frontières fiche nommément des travailleurEs. En ce début d’année 2025, ils avaient fait une liste d’une soixantaine d’avocatEs désignéEs coupables de «l’invasion migratoire». Ces dernierEs ont, par la suite, reçu des menaces et des insultes pour avoir défendu des personnes sans papiers en vue de leur régularisation. 

La méthode est toujours la même : cibler, ficher, publier sur des réseaux d’extrême droite, appeler au harcèlement, menacer et violenter sur internet et dans la rue. Et ce, dans le but d’intimider et faire taire toutes les personnes qui s’opposent à leurs idées réactionnaires, identitaires et racistes.

Ces attaques doivent non seulement nous faire réagir mais aussi nous obliger à adapter nos stratégies syndicales, en intégrant la lutte contre les militantEs d’extrême droite sur les lieux de travail, qui s’attaquent à la liberté syndicale et à la liberté de mobilisation, que ce soit pour la justice sociale, contre le racisme ou pour la Palestine.

L’extrême droite doit être combattue sous toutes ses formes : qu’elle porte une cravate à l’Assemblée Nationale, un micro pour propager ses idées dans les médias ou une cagoule pour agresser des citoyenNEs en bande. La lutte syndicale doit prendre toute sa place dans ce combat, dans l’unité la plus large possible.

LM