C’est une « petite phrase » glissée par Macron dans la longue interview qu’il a accordée au Parisien le 23 avril : « Je ne suis ni naïf ni dupe, les réformes des retraites, c’est toujours difficile. Depuis qu’il y en a eu, elles se passent toujours mal. Donc, c’est toujours mieux de le faire en début de mandat. » Arrogant comme à son habitude, Macron joue ici les fiers-à-bras, comme il le fait tout au long de cette interview-fleuve au cours de laquelle il multiplie les provocations sur fond d’autosatisfaction.
Plus que jamais, Macron apparaît « en même temps » déconnecté du réel et déterminé à poursuivre son entreprise de contre-révolution néolibérale. C’est ainsi qu’il justifie de ne pas taxer les grandes entreprises tout en assurant qu’il faut davantage contraindre les chômeurEs, ou qu’il affirme sans rire que les casserolades et autres rassemblements organisés à l’occasion de ses déplacements ou ceux de ses ministres font « dysfonctionner notre démocratie [car] le but est d’empêcher les autres de s’exprimer ».
Et le reste est à l’avenant jusqu’à une ultime provocation : « Marine Le Pen arrivera [au pouvoir] si on ne sait pas répondre aux défis du pays et si on installe une habitude du mensonge ou de déni du réel. » On croit rêver, ou cauchemarder, face à ce renversement de la culpabilité venu du chef d’une « majorité » spécialiste des fake news (sur les retraites à 1 200 euros, les retraites des femmes, etc.) et particulièrement qualifié dans le domaine du « déni de réel » face à une opposition massive à sa politique.
Au-delà des « petites phrases », le message envoyé par Macron est clair : il prétend rester droit dans ses bottes et garder le cap, faisant mine de ne pas voir qu’il est minoritaire. Mais dans le même temps, la fébrilité est palpable puisque la condition pour adopter ce positionnement est une occultation totale de l’ampleur et de la profondeur de la contestation face à la contre-réforme des retraites et, au-delà, de l’opposition à son projet de société ultra-libérale.
Comme un encouragement à multiplier les initiatives, à continuer les casserolades, la chasse aux ministres et autres représentants du gouvernement, et à se donner la perspective d’un blocage total du pays, du fonctionnement de son économie et de ses institutions. Pour les faire reculer, et pour que le « début de mandat » de Macron soit en réalité le début de la fin.