Publié le Mercredi 17 mai 2017 à 09h58.

Macron : ni gauche ni gauche... Combattre les reculs sociaux, c’est maintenant !

Le roi est mort, vive le roi ? La cérémonie du sacre républicain a bien eu lieu, et Macron est devenu dimanche le huitième président de la 5e République...

Pourtant, au regard le la séquence électorale et de ses nombreux retournements de situation, le nouveau président semble être le grand gagnant... d’un concours de circonstances. Vainqueur du premier tour après une campagne à multiples rebondissements qui a vu le renoncement de Hollande, l’élimination de Valls à la primaire, la dégringolade de Hamon et l’affaiblissement d’un Fillon donné grand gagnant, Macron a pu bénéficier à plein du « front républicain » pour battre le FN.

Demandez le programme... de régression sociale !

Macron n’en reste pas moins le candidat de la bourgeoisie. Les relations qu’il a nouées dans sa fulgurante carrière, tant dans le privé que dans le public, ont vu en lui la figure parfaite du grand commis d’État et du banquier d’affaire. Idéal pour faire le job ! Car Macron, comme il aime à le répéter, a un « projet », celui du néolibéralisme.

Et tel le premier DRH de France, il compte bien le mener jusqu’au bout. Sa volonté de modifier de nouveau le code du travail par ordonnances et ce dès cet été, s’inscrit dans cette optique. Pour parvenir à ses fins, le nouveau président ne compte s’embarrasser ni de dialogue social ni de débats parlementaires, et surtout espère ainsi prendre de court tout mouvement social en appliquant la « stratégie du choc ».

Et il ne s’agit que d’un début, car dans ses premières mesures figurent également la suppression des cotisations salariales, le plafonnement des indemnités en cas de licenciement abusif, l’étatisation de l’assurance chômage, la suppression de 120 000 postes dans la fonction publique… Bref, une cure d’austérité assurée, une privatisation des profits et une socialisation des pertes.

Quant à ses mesures pour plus d’égalité, notamment en matière d’éducation, elles s’inscrivent également dans un cadre d’austérité. Dans les écoles relevant de l’éducation prioritaire, la mise en place de classes de CP et de CE1 avec 12 élèves... se fera au détriment du dispositif « plus de maîtres que de classes » afin de redéployer des postes existants et de ne pas avoir à en créer. Sans compter que, dans son empressement à afficher une mesure progressiste, le nouveau président néglige le problème des locaux, laissant les communes trouver des solutions pour s’adapter.

À peine élu et déjà affaibli ?

Mais pour faire passer de telles mesures, le nouveau président risque de se retrouver confronté à un déficit de légitimité. Derrière les 66 % des voix pour Macron se cache une autre réalité : si l’on retire les votes blancs, nuls et l’abstention, seuls 43,63 % du corps électoral s’est exprimé en sa faveur, chiffre auquel il faut encore retirer toutes celles et ceux qui ont seulement voulu faire barrage au Front national. 

Les législatives sont donc un enjeu crucial pour le nouveau président. Certes, il dispose des commodes – et autoritaires – institutions de la 5e République (ordonnances, 49.3…), d’un solide appareil d’État, et d’un appareil de répression renforcé dans le cadre de l’état d’urgence. Mais pour en bénéficier pleinement, il lui faut une solide majorité. 

Face aux risques d’une assemblée fragmentée entre les forces politiques ayant fait les quatre plus hauts scores au premier tour de la présidentielle, le nouveau président risque de se retrouver sans majorité absolue. La nomination d’Édouard Philippe, Premier ministre « transgressif » de droite 100 % assumée, vise alors à essayer de rassembler autour de lui, une partie du PS lui mangeant déjà dans la main. Cette majorité présidentielle rassemblera en réalité tous ceux qui depuis dès années cherchent à nous faire avaler la pilule de l’austérité et à appliquer des mesures néolibérales. Reste à voir combien de temps une si fragile alliance pourra tenir avec un pouvoir si peu légitime et dans le cadre d’un système à bout de souffle.

Riposter, reconstruire

Une telle fragilité du pouvoir, dans un contexte de rejet de la politique institutionnelle, avec un président qui tentera par tous les moyens d’imposer son programme néo­libéral, risque fort de mener à une crise politique et sociale majeure. Avec le FN en embuscade, il est plus qu’urgent de reconstruire un mouvement ouvrier organisé, de renforcer les outils d’action collective et de créer un front social et démocratique qui permette de s’opposer concrètement au nouveau gouvernement.

Il nous faut porter l’idée d’un élargissement et d’un dépassement des forces de l’extrême gauche et de la gauche radicale, mais aussi et surtout la convergence des forces inorganisées des luttes, des luttes du salariat mais aussi de celle pour l’égalité des droits et celles de nouveaux terrains comme la justice climatique.

Car, on l’a vu il y a un an au moment de la loi travail, les possibilités de résistance existent, mais il faut tracer des perspectives politiques dans ces luttes pour leur permettre de s’amplifier et de contrer jusqu’au bout l’offensive antisociale et réactionnaire.

Camille Jouve