Après un suspense haletant de deux semaines, l’annonce du nouveau gouvernement est enfin (?) tombée. Une annonce qui pourrait se résumer à « beaucoup de bruit pour rien », le nouveau gouvernement s’inscrivant dans la parfaite continuité du précédent…
Le long flottement autour du remaniement a moins traduit les atermoiements sur un très hypothétique tournant politique qu’un manque de personnel de confiance en Macronie. Le premier manager de France semble faire face à un problème de ressources humaines.
« Société civile » ?
Pourtant, après les démissions fracassantes de Hulot et de Collomb, l’affaire Benalla, la mauvaise conjoncture économique et les sondages au plus bas, Macron aurait pu mesurer l’ampleur de la crise politique qui vient et changer de cap. Mais que nenni, il a été élu pour faire le job et il le fera !
Mais le vernis du « nouveau monde » s’est effrité. Et la « nouvelle gouvernance » fait déjà figure de vieille recette. Ainsi, la ficelle de la « société civile », avec la nomination d’Emmanuelle Wargon, directrice des affaires publiques chez Danone (et fervente défenseuse de l’huile de palme), comme secrétaire d’État à la Transition écologique, paraît bien grossière tant cela revient à assimiler « société civile » et lobbying. Pour ceux qui avaient encore des doutes sur les velléités de Macron en matière d’écologie, l’installation du duo De Rugy-Wargon au ministère est un blanc-seing à l’inaction écologique. L’industrie agro-alimentaire peut dormir sur ses deux oreilles, ses -intérêts seront bien gardés…
Du vieux avec du neuf
De même, le débauchage de personnalités d’autres bords politiques pour incarner le « en même temps » si cher au Président Macron a fait son temps. Le casting n’est pas brillant, aucune tête d’affiche n’a été trouvée pour assurer la promotion du nouveau gouvernement. À croire que l’impopularité de Macron a fait fuir même les plus opportunistes. Les nouveaux promus, comme Didier Guillaume, ancien socialiste, et Franck Riester, député LR passé du côté des « Constructifs », sont des inconnus du grand public.
Mais si le premier, nommé à l’Agriculture, a pour seul mérite, d’avoir été un proche de Manuels Valls, le deuxième est un plus gros poisson. Il donne un gage de plus à la droite et permet de neutraliser les « Constructifs » pour les élections européennes, avec la perspective de listes d’union avec les opposants à Wauquiez et le Modem ; Modem qui retrouve, avec la nomination de Marc Fesneau aux Relations avec le Parlement et la promotion de Jacqueline Gourault à la Cohésion des territoires, une place de choix, après avoir dû le déserter suite à ses casseroles liées à ses attachés parlementaires. Et une fois de plus, Macron agit en maître pour faire du vieux avec du neuf…
Manque de personnel politique
La nomination de Franck Riester présente un autre intérêt. « Expert » en audiovisuel, ce proche du Premier ministre aura pour charge de s’occuper de l’unique « grand chantier » du ministère de la Culture : celui de la refonte de l’audiovisuel français. Nul doute qu’il saura faire appliquer des réductions de postes drastiques et des économies à tous les étages.
Du côté des « marcheurs », tous ces nouveaux engagés en politique, un seul se voit remercier d’un portefeuille de secrétaire d’État : Gabriel Attal à l’Éducation. Celui dont le principal mérite aura été de jouer les premiers de la classe sur les plateaux télé aura pour tâche d’organiser la coquille vide qu’est le futur Service universel. Christophe Castaner abandonne quant à lui son rôle de chef de parti pour reprendre le poste de Collomb. -Débarqué du ministère des Relations au Parlement et du porte-parolat du gouvernement il y a un an pour reprendre en main le parti, ce fidèle de la première heure se retrouve de nouveau à un poste clef, comme si personne d’autre n’était en mesure de l’occuper. Preuve que la Macronie manque cruellement de personnel politique.
Le nouveau gouvernement est donc dans la parfaite continuité du précédent, mais il est le signe d’un essoufflement encore plus prononcé de son chef d’orchestre. À nous de lui porter un coup d’arrêt pour l’empêcher de poursuivre sa politique destructrice.
Camille Jouve