Avec 25,6 % des voix en moyenne sur l’ensemble du pays, 31,2 et 29 % dans les vieilles régions industrielles du Nord-Ouest et de l’Est, l’extrême droite réalise son score le plus élevé.
L’extrême droite le arrive largement en tête et confirme une implantation nationale. L’abstention massive n’autorise pas à se rassurer. Rien ne dit que celles et ceux qui ne sont pas allés voter auraient fait un choix sensiblement différent.
Ni rire ni pleurer, comprendreLe FN profite de la division de la droite classique, des affaires, et de la corruption qui éclatent au grand jour, de la crise de l’UMP qui l’empêche d’engranger le désaveu du PS. Quant au Parti socialiste, il a bien mérité de tomber à moins de 14 %. Il n’a pas volé sa défaite, payant ainsi la politique favorable au patronat menée depuis plus de deux ans. C’est donc tout le système institutionnel fondé sur l’alternance entre l’UMP et le PS qui est ébranlé. Dans la plupart des pays d’Europe, une sanction similaire touche les gouvernements qui ont mis en œuvre les diktats de la Commission européenne, de la BCE et du FMI contre les travailleurEs et les peuples. Elle sanctionne aussi une Europe capitaliste antidémocratique et éloignée des préoccupations de la majorité des populations.
RésisterLe FN a réussi à usurper la représentation du rejet du gouvernement et d’un système qui décidément ne représentent en rien les 99 %. Le poids politique accru de ce parti augmentera la visibilité et la légitimité de ses réponses autoritaires et nationalistes. Il ne peut que libérer l’expression décomplexée du racisme et du sexisme, de la haine de l’autre, et constitue un danger que nous ne devons pas sous-estimer. Cela appelle un combat unitaire, une riposte antiraciste, féministe, pour l’égalité des droits, la solidarité internationale. Un an après l’assassinat de Clément Méric, les manifestations du samedi 7 juin sont une première échéance qui doit permettre de rassembler le plus largement celles et ceux qui ne veulent pas laisser la voie libre à l’extrême droite et à ses idées nauséabondes.
ReconstruireDimanche les urnes ont montré la désespérance sociale de celles et ceux qui souffrent des politiques d’austérité mises en œuvre par les gouvernements successifs. C’est – aussi et surtout– la conséquence de l’effondrement du mouvement ouvrier, qu’il soit politique ou syndical, incapable de constituer un rempart face aux coups répétés d’un système capitaliste en crise mais qui fait payer durement celle-ci aux populations. Car là est bien le cœur du problème. Le Parti socialiste est directement et irrémédiablement responsable et coupable des politiques de baisse du « coût du travail », des privatisations, de la mise à mort des services publics et de la protection sociale qui détruisent nos emplois et nos vies au nom de la compétitivité et de la croissance. Dès lundi, Manuel Valls s’est empresser d’affirmer : « Je ne changerai pas de feuille de route », et Hollande a confirmé. Sans surprise, il n’y a rien à attendre du côté du gouvernement. Mais à sa gauche aucune force, ni politique, ni syndicale, ni sociale, ne parvient à apparaître comme utile et efficace pour résister. Ces outils sont à reconstruire.
MobiliserLes résultats électoraux doivent opérer un choc salutaire. Ils doivent résonner comme un appel pressant à donner des suites à la marche du 12 avril. Cette première initiative a permis d’unir dans la rue non seulement les forces politiques qui s’opposent au gouvernement mais aussi des secteurs mobilisés et des forces syndicales qui refusent l’inaction des directions confédérales. Ce premier pas doit être suivi de beaucoup d’autres. Nous avons collectivement besoin de reconstruire des solidarités et des résistances concrètes qui fassent la preuve de leur efficacité contre les expulsions, contre les licenciements... Nous avons besoin de mobilisations unitaires et massives contre le budget d’austérité, contre le Tafta, ce traité transatlantique qui laisserait aux multinationales la liberté totale d’exploiter, d’empoisonner et de polluer... Nous avons besoin d’une victoire, c’est peut-être possible à Notre-Dame-des-Landes, et nous devons y mettre toutes nos forces. Et nous avons aussi besoin d’élaborer une alternative globale à ce monde en crise capable d’engendrer les pires catastrophes, politiques, sociales et écologiques. Pas d’autre choix que de nous atteler à toutes ces tâches, sans attendre : il y a urgence !
Christine Poupin