Selon Santé publique France, en août, 80 % des patientEs admis pour Covid en soins critiques n’étaient pas vaccinés. Et c’est bien grâce à la vaccination que le variant Delta n’a pas causé une explosion épidémique, comme aux Antilles ou en Polynésie, alors qu’il est deux fois plus contagieux et qu’il multiplie par deux les risques de réanimation.
L’épidémiologiste Samuel Alizon a calculé que la vaccination a permis d’épargner 50 000 vies en France, entre le 1er janvier et le 20 août. Il souligne « que si la protection contre les formes graves est intéressante au niveau individuel, d’un point de vue épidémiologique, c’est le fait d’empêcher la transmission qui permet d’éviter le plus de passage en réanimation ». Impossible donc de séparer protection individuelle et collective en matière de vaccination. Le vaccin est donc bien un… bien commun, et pas seulement un choix individuel !
Un pass sanitaire inefficace et liberticide
Macron attribue ce bilan à son pass sanitaire, ajoutant que la France a rattrapé les autres pays européens en matière de vaccination. Mais, derrière les chiffres d’une politique de vaccination qui a plus cherché à contraindre qu’à convaincre, le bilan est tout autre. Alors qu’en termes de santé publique, ils et elles devraient être la priorité des priorités, 15 % des plus de 80 ans n’ont reçu aucune dose de vaccin. Un chiffre que le pass sanitaire n’a quasiment pas fait bouger. Dans le même temps, le chiffre des plus de 80 ans vacciné flirte avec les 100 % en Espagne, les 95 % en Belgique. Même constat si l’on regarde du côté des diabétiques ou des obèses.
Leur pass sanitaire est inefficace pour convaincre les hésitantEs, pour aller vers celles et ceux qui sont éloignés de la vaccination. Il est liberticide, met la pression sur le droit du travail, le secret médical. Dans un langage plus diplomatique, le Conseil scientifique, dans une note d’alerte au gouvernement, souligne les limites du pass sanitaire, qui « ne doit être compris ni mis en œuvre comme une protection absolue contre la contamination ». Face au Delta, les risques sont accrus avec les tests PCR à la validité étendue à 72 h et une efficacité vaccinale diminuée en matière de transmission.
Pour une vraie politique de santé publique
Maintien des gestes barrières dans les lieux clos, notamment masques, aération, testeurs de C02, réquisition de locaux pour limiter la jauge dans les écoles, les cantines, embauches de personnels… devraient faire partie des priorités en cette rentrée face au covid. Tout le contraire du pass, qui semble donner le droit d’oublier la covid. Pour toutes ces raisons, nous le rejetons. Et nous lui opposons une politique de santé publique, de santé communautaire, qui vise à mobiliser toute la société pour aller vers les plus faibles, les plus âgéEs, les sans-papiers, les SDF. Un exemple : à Rouen, le collectif des sans-papiers et l’UD CGT interrogent la préfecture depuis le début de l’année sur la vaccination des sans-papiers, dont certains n’ont ni AME ni Sécu, travaillent souvent dans des arrière-cuisines surchauffées, sans masque. Des droits, des papiers pour les premiers de cordée ! Pas de réponse. Interrogation du centre de vaccination, qui transmet immédiatement à la direction du CHU. Pas de réponse. En fait, depuis le 28 janvier, un dispositif très simple permet de vacciner et d’enregistrer sans numéro de Sécu. Droits méconnus, sans aucune campagne de promotion, égale plusieurs mois de retard dans la vaccination.
Lever, ensemble, les freins à la vaccination
Partout, dans les quartiers, les entreprises, les écoles, en lien avec les associations, les personnels de santé, les mairies, devraient se tenir des réunions pour aider à lever les freins à la vaccination, répondre aux interrogations, donner des droits. Que neuf mois après le début de la vaccination, le gouvernement en soit encore à survendre auprès des médias des dispositifs « expérimentaux » comme l’envoi automatique de convocations vaccinales dans le Vaucluse et en Seine-Saint-Denis, ou le passage de postiers pour identifier les freins à la vaccination en Seine-Maritime, en dit long sur la faillite de la santé publique.
Au moment où Macron lance la troisième dose, l’OMS note que les pays du Sud sont toujours privés de vaccins. Contre l’apartheid vaccinal, qui tue et favorise l’émergence des variants, s’attaquer aux brevets, imposer réquisitions et transferts de technologie, voilà le seul moyen de faire des vaccins anti-covid un bien commun universel accessible partout, contre un virus en pandémie qui ignore les frontières.