Sarkozy en avait rêvé, les mutuelles le font. La Mutualité propose de rembourser les affections de longue durée (maladies graves) à la place de la Sécu.
Un ballon d’essai avait été lancé l’année dernière : le directeur de l’assurance maladie, issu des assurances privées, comme Xavier Bertrand et bien d’autres, avait proposé que la Sécurité sociale ne rembourse plus à 100 % les affections de longue durée (ALD). Face au tollé, le gouvernement avait démenti de telles intentions. Réunie début juin en congrès, en présence de Nicolas Sarkozy, la Mutualité française a proposé de gérer des filières de soins qui prendraient en charge ces maladies graves, afin « de réaliser ce que l’assurance maladie n’arrive pas à faire », immédiatement approuvée par le chef de l’Etat : « Expérimentons, si c’est positif, nous généraliserons. »
Déjà, bien des mutuelles renoncent aux principes de solidarité. Selon l’option choisie et le montant de la cotisation, le niveau de la couverture est différent. Pas étonnant que l’assurance privée, à grand renfort de publicité, grignote une part croissante du « marché » des complémentaires santé ! Il devient de plus en plus difficile de distinguer une mutuelle d’une assurance.
La Fédération nationale de la Mutualité française (FNMF) voulait prendre en charge la couverture de la maladie en 1945. Elle en a été privée en raison de son attitude pendant l’Occupation. La FNMF regroupe la très grande majorité des mutuelles. Les mutuelles historiquement liées à la CGT l’ont rejointe en 2002. Il existe cependant « des mutuelles solidaires », qui s’opposent à ces dérives. La FNMF tient-elle sa revanche ? Elle revendique un rôle croissant dans la gestion de l’assurance maladie. Elle a obtenu, en 2004, de participer aux décisions concernant les remboursements dans le cadre de l'Union nationale des organismes complémentaires, regroupant les mutuelles, les organismes de prévoyance et les assurances. Elle a ainsi ouvert la porte de la bergerie aux loups des assurances privées. Les mêmes seront représentés dans les agences régionales de santé qui, dans le cadre de la loi Bachelot, auront pour fonction la « gouvernance » de l’hôpital, de l’action sociale et de la Sécu. Autrement dit, la Mutualité participera à leur démantèlement.
Déremboursements, forfaits et franchises, honoraires libres bientôt généralisés, la Sécu rembourse de moins en moins. Les complémentaires prennent une place croissante et augmentent les tarifs payés par les assurés. C’est tout bénéfice pour le patronat, qui aimerait bien être totalement exonéré de la cotisation sociale. Déjà, une personne sur cinq renonce à des soins pour des raisons financières. Demain, combien seront-elles ? Il y a urgence : préparons la mobilisation unitaire pour le maintien immédiat des ALD remboursées par la Sécu à 100 % et la perspective du remboursement de la totalité des soins à 100% par un seul organisme, la Sécurité sociale autogérée par des administrateurs élus par les assurés sociaux, et au sein de laquelle seront intégrées les mutuelles avec leur patrimoine et leurs personnels.