Publié le Samedi 1 février 2020 à 23h01.

Le Havre : Philippe bunkerisé dans son premier meeting de campagne

De report en report, coincé entre son calendrier national bousculé par la grève, et une équipe municipale à la dérive, incapable de démarrer la campagne sans lui, il a bien fallu qu’Édouard Philippe finisse par se déclarer candidat à la mairie du Havre ce vendredi.

Sous pression

Depuis son départ pour les plus hautes fonctions, la ville du Havre a en effet déjà usé deux maires par intérim : l’assureur Lemonnier, LREM, parti avec du goudron et des plumes suite aux affaires de trafic d’influence à caractère sexuel, et le catho tradi LR Gastine, peu adapté à la sociologie de la ville. Si on rajoute à cela le décès par crise cardiaque du directeur de cabinet qui devait gérer la boutique au quotidien et la multitude de conflits entre les différents clans, Philippe avait un peu la pression.

Dans le contexte de mobilisation contre la réforme des retraites et de discrédit généralisé du personnel politique qui découle de l’attitude et de la politique du gouvernement, il fallait oser revenir se présenter devant les havrais en annonçant prendre la tête de liste… Pour rester Premier ministre. Philippe l’a fait. Il n’avait pas vraiment le choix. Ce n’est donc pas tout à fait un hasard s’il a annoncé sa candidature dans la presse nationale le matin, sans attendre le meeting du soir au Havre.

Le Havre mobilisée

Depuis décembre la mobilisation contre la réforme des retraites est particulièrement importante au Havre. En janvier l’entrée en reconductibles des portuaires, dockers et marins a paralysé le port pendant trois semaines. Les vœux de Gastine et du patronat ont été investis par les manifestants : mairie envahie et socialisation du champagne, mobilisation impressionnante des dockers et portuaires à la chambre de commerce et d’industrie, où la police a dû rester retranchée dans l’édifice… Le mythe de la droite sereine dans ces baskets sur la ville, qui n’a pas besoin d’interposer la police entre elle et son corps électoral était déjà bien écorné.

Comme prévu, de nombreux manifestants se sont donc rassemblés pour s’inviter au meeting de lancement de campagne ce vendredi soir. Si les dockers et portuaires n’avaient amené que leur service d’ordre, vraisemblablement pour éviter un certain degré d’affrontement, plus de 1 500 personnes, Gilets jaunes, syndicalistes de tous corps de métiers, citoyens indignés par la mascarade ont donc tenté de s’approcher de la salle du meeting. Fait inhabituel au Havre, mais pas surprenant dans le contexte, le quartier était bunkerisé par la gendarmerie mobile.  

Bon enfant au départ la situation s’est donc un peu tendue devant ce déni de démocratie

Plusieurs centaines de manifestants ont commencé à tenter de lever cette entrave inacceptable à la liberté de circulation démontant les barrières anti-émeutes pour s’affronter avec les cordons de gendarmerie. Œufs, peinture, farine, fumigènes pétard barrières et objets divers ont donc fusé en direction de la police, sans permettre cependant aux plus combatifs de forcer les cordons, qui avaient pourtant vraisemblablement reçu l’ordre de ne pas taper trop fort pour ne pas achever de ridiculiser l’entrée en scène de Philippe. Quelques tentatives de contournement du dispositif infructueuses plus tard, accompagnées de gazage et d’expédition en urgence des compagnies de CRS de réserve, la manifestation a donc fini par se dissoudre laissant Philippe dans son bunker.

La mobilisation contre la réforme des retraites et la politique du gouvernement n’est pas près de s’arrêter, et le message est passé : Philippe, prends ta retraite, pas les nôtres.