Publié le Jeudi 10 février 2011 à 09h18.

Il y a un an, rue Victor Hugo

Soumis par bagnolet93 le jeu 10/02/2011 - 09:18

C’est le mercredi 10 février 2010 à 6 heures du matin que la municipalité de Bagnolet a fait évacuer le squat du 92 rue Victor Hugo. Par une température de moins 5°, les occupants présents ont eu cinq minutes pour se retrouver dans la rue couverte de verglas. Le tractopelle diligenté par la mairie a effondré le bâtiment dans les heures qui ont suivi ne laissant que la façade pour masquer le tas de gravats sous lequel les effets personnels des occupants et surtout leurs papiers administratifs ont été enfouis. Ceux qui étaient déjà partis au travail ont ainsi vu toute une partie de leur histoire détruite.

 

Pour se justifier face à une opinion publique scandalisée par la méthode employée et le choix de la date, émue par l’errance à laquelle ont été condamnés les squatteurs, le Maire Marc Everbecq et son premier adjoint Laurent Jamet, tous deux du PCF, ont expliqué que le squat était « devenu un lieu de trafic de drogue, de voitures, de prostitution et de tapage nocturne qui durait depuis des années ». Lors de l’intervention policière le 10 février comme lors de la perquisition de janvier, la police n’a pourtant rien trouvé de tel : pas de drogue, pas de pièces de voiture, pas de prostituées. Les 41 occupants du squat étaient en fait pour beaucoup des travailleurs ordinaires, certains sans papiers, certains avec des cartes de séjour et d’autres français, quelques enfants aussi scolarisés à l’école voisine.

 

Des Bagnoletais, avec l’aide du DAL et de la Confédération paysanne dont le siège est proche, et le soutien du NPA, des Verts, du PS et du PG ont créé un comité de soutien. Après quelques jours dans des tentes sur le trottoir, la municipalité a mis à disposition une salle jouxtant une école maternelle, drôle de lieu pour regrouper des « trafiquants et des drogués », mais surtout un lieu sans hygiène. C’est finalement la confédération paysanne qui a ouvert ses locaux pour que les squatteurs soient accueillis dans des conditions précaires, mais dignes, ils ont ensuite été relogés en hôtel social.

 

Les membres du comité de soutien ont parrainé les sans papiers, entrepris les démarches pour leur régularisation, c’est en  bonne voie pour certains.

 

Pour se justifier encore, la mairie a expliqué qu’elle « travaille sur ce dossier depuis de longs mois, s’est rendue propriétaire des lieux en juin 2009 afin, de construire à cet endroit 50 logements sociaux. Dans une ville où 2 700 demandeurs de logement sont en attente, souvent depuis des années, sortiront bientôt ici, des logements HLM neufs et accessibles pour tous. »

Un an après, où en est-on ? Le terrain a été nettoyé des gravats et grillagé, puis plus rien. On a appris que la mairie avait un acheteur en vue, le groupe Auchan, pour y construire des logements pour son personnel dans le cadre des budgets qu’il doit consacrer au « 1% logement ». Ces logements ne seront donc pas accessibles à tous comme le prétendait le maire. De 50 logements au départ, on ne parle plus que de 25. Où était l’urgence, pourquoi avoir choisi le jour le plus froid de l’hiver pour expulser sans relogement une quarantaine de squatteurs ? Un an après la rue est toujours aussi sale, les poubelles sont toujours déposées devant le 92, ce n’étaient peut-être pas les squatteurs qui étaient les plus sales.

 

Comme vient de le rappeler le dernier rapport du mal-logement en France de la Fondation Abbé-Pierre, il y a 10 millions de personnes mal logées en France dont 100 000 squatteurs et 3.5 millions de très mal logés. La municipalité de Bagnolet est donc comme beaucoup d’autres confrontée à une situation qui la dépasse, une situation créée par les politiques gouvernementales des dernières décennies et aggravée ces dernières années par une politique en faveur de l’accession à la propriété qui d’après la fondation favorise surtout les entreprises de construction, les agences immobilières et les banques sans permettre de résorber le mal-logement.

 

Cette situation ne justifie en aucun cas la méthode employée par la municipalité et le maire, membre du PCF (il a même été au Conseil national jusqu’en avril 2006) et les insultes employées contre les squatteurs « il ne s'agit même pas d'un squat car aucune personne n'habite réellement dans cet endroit en dehors des quelques gardiens, jours et nuit, de la plus grosse base de trafic de crack du 93. Ni famille, ni femmes, ni enfants, ni travailleurs, ni "sans toit", mais des trafiquants, des voyous et des bandits pour parler simplement mais clairement. »

A Bagnolet comme ailleurs nous continuerons à nous battre pour :

- pas d’expulsions sans relogement

- une politique de rénovation des  HLM existants

- la construction de logements sociaux accessible à tous

- la régularisation des sans papiers

 

Le 10 février 2011