Alhoussein Camara avait 19 ans. Le 14 juin dernier, alors qu’il allait, comme d’habitude, embaucher dans une base logistique à Roullet, près d’Angoulême, il a croisé la route de la police. Alhoussein a été tué, par balle. Jeune guinéen, il jouait au football avec le club de Leroy-Angoulême. Ses amiEs, ses proches, ses collègues le pleurent et demandent justice.
La réaction a été immédiate. Des centaines de personnes, du quartier de la Grande-Garenne à Angoulême, se sont mobilisées en occupant la rue le soir même. Et le lendemain, le rond-point de l’Éperon dans le centre-ville a été occupé une bonne partie de la journée. Le samedi qui a suivi, une marche a réuni plus de 1 000 personnes. Il y avait beaucoup d’émotion, et en face une police sur-armée. Plusieurs personnes ont subi de la répression (arrestations, gazages…). Cela était déjà un peu inhabituel pour une ville comme Angoulême où, globalement, la répression policière lors des manifestations n’est pas très forte (bien que plusieurs arrestations aient eu lieu ces dernières semaines lors d’actions militantes). Il faut dire que la police, gangrenée par le racisme, ne supporte pas de voir des NoirEs et des Arabes défiler, revendiquer, être en colère.
La mort de Nahel
La mobilisation complètement spontanée, même si plusieurs collectifs, syndicats, partis ont apporté leur solidarité (collectif Baobab, Attac, Solidaires, NPA, LO, LFI…), a été suspendue. Notamment parce qu’il y avait le temps du deuil, rendu compliqué par l’autopsie et les difficultés à rapatrier le corps en Guinée où la famille voulait qu’Alhoussein soit enterré (ce qui est fait désormais). La possibilité que ce crime policier tombe dans l’oubli était réelle. Mais le 27 juin, la mort de Nahel, tué lui aussi par un policier, a enflammé les quartiers de France. Les similitudes entre les deux morts sont telles que la colère a surgi : la mort d’Alhoussein n’était pas un fait divers. La police tue. C’est systémique. Une quinzaine de personnes sont tuées chaque année. Nous étions nombreusEs à le savoir, car nous avons suivi plusieurs combats, mais cette fois-ci, nous, et beaucoup d’autres, pouvions le voir : une vidéo montrant un policier tuer Nahel à bout portant alors qu’il n’était pas en danger. Qu’en était-il d’Alhoussein ? Comme par hasard, la caméra du policier ne fonctionnait pas… et à 4 h du matin, il n’y avait pas de témoins pour filmer. Ces mêmes caméras fonctionnent très bien lorsqu’il s’agit de filmer les jeunes ou les manifestantEs.
Justice pour Alhoussein
Dès lors, à Soyaux et à la Grande-Garenne, la révolte a embrasé les rues. Le mercredi 28 juin au soir, alors qu’un rassemblement pour dénoncer la dissolution des Soulèvements de la Terre était organisé, les noms de Nahel et d’Alhoussein étaient sur toutes les lèvres. La justice doit être rendue. Un article de Mediapart a permis de remettre en lumière ce qu’il s’est passé à Angoulême, sous la plume de David Perrotin « "Pourquoi personne n’en parle ?" : 15 jours avant Nahel, Alhoussein, 19 ans, a été tué par la police à Angoulême ». On apprend aussi que le policier a été mis en examen pour homicide volontaire. Depuis, le Monde en a parlé, ainsi que Sofoot dans un magnifique article où il est surnommé le « Mbappé d’Angoulême ». C’est bien, mais insuffisant. La mobilisation pour demander justice est alors lancée. Un collectif se crée, autour d’une association. Samedi 8 juillet, 500 personnes ont manifesté à Angoulême. La lutte continue, pour la vérité et la justice.