Le lundi 5 novembre, 13 migrants sont morts en tentant de rejoindre Melilla. Les mesures obscènes et dramatiques mises en place pour empêcher les migrantEs de venir en Europe fonctionnent.
Obscènes et dramatiques, les mortEs, en mer ou sur la route, noyés, écrasés ou électrocutés. Obscènes et dramatiques les viols, emprisonnements, esclavages et tortures au Niger ou en Libye.
La barbarie fonctionne
Oui, cette politique des gouvernements européens, de Macron comme de Salvini, fonctionne : le nombre d’entrées a été divisé par cinq depuis 2016 et par deux en comparaison de l’an dernier.
Mais qu’est-ce qui fonctionne ? Les salaires n’ont pas augmenté, le chômage n’a pas diminué, pas plus que le nombre de sans-abris. Preuve s’il en fallait encore que ce n’est pas l’immigration qui est responsable.
Alors qu’est-ce qui fonctionne ? L’hécatombe continue : il y a toujours autant de mortEs en Méditerranée. Plus de 1 600 entre janvier et août. Nos sociétés s’habituent, ferment les yeux pour certainEs et se réjouissent pour d’autres. Bref, s’ensauvagent.
Voilà ce qui fonctionne, la barbarie. Et c’est le prix à payer, désormais vivre n’est plus la norme, la base d’espoirs ou de revendications. Les migrantEs sont la pointe avancée d’un modèle de société ou, pour le plus grand nombre, survivre serait la norme. Comment alors se plaindre si tu as un emploi, soit-il précaire, un logement soit-il délabré ?
Pour une « submersion solidaire »
Mais la barbarie n’est pas une fatalité. L’année passée, les collectifs de sans-papiers, les familles de victimes des violences policières, les réseaux de solidarité s’étaient mobilisés, dans le cadre de la Marche des solidarités, contre le pouvoir en faisant appel, sans grand succès, au mouvement social. C’est pourquoi nous nous sommes réjouis, depuis septembre, de la tribune écrite par Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, « Ce n’est pas l’immigration qui crée du dumping social » et de l’appel lancé par Regards, Mediapart et Politis, « Pour l’accueil des migrants ».
Cette dynamique pourrait porter ses fruits. La CGT, Solidaires, les collectifs de sans-papiers et la Marche des solidarités ont initié un appel commun qui va être rejoint très largement pour une journée nationale de manifestations et rassemblements le 18 décembre prochain à l’occasion de la journée internationale des migrantEs. Pour « la liberté et l’égalité des droits », pour « la liberté de circulation, la fermeture des centres de rétention, la régularisation des sans-papiers », c’est l’occasion de faire converger toutes les forces, mouvements de solidarité, collectifs, syndicats, associations, pour une « submersion solidaire ».
Marches aux flambeaux en hommage à nos frères et sœurs morts sur les routes de la migration, marches aux fumigènes pour lever l’étendard de la riposte : nous avons un mois pour construire et lancer une dynamique qui inverse les tendances à l’œuvre. Pour en finir avec les mortEs, les frontières et l’ensauvagement du monde.
Denis Godard