Une véritable politique de protection de la nature est nécessaire et pourrait s’articuler autour de mesures structurelles.
On ne peut pas protéger la biodiversité indépendamment du fonctionnement de l’économie, et en particulier de l’agriculture qui constitue le principal élément de déclin de la biodiversité. Espérer l’enrayer en protégeant des bouts d’espaces ou des espèces, même s’ils sont reliés par des corridors écologiques, est totalement illusoire. Il faut pouvoir agir sur 100 % du territoire : par une agriculture 100 % bio, par la mise en place d’un système de polyculture avec de petites parcelles. Il faut rendre cet objectif obligatoire, rapidement et partout, même si, bien sûr, on doit en négocier les modalités avec le monde agricole et les citoyenEs. Cela implique de remettre en cause l’agro-industrie, la grande distribution, la malbouffe.
Il faut aussi favoriser la diversité des espèces cultivées et élevées, en laissant aux paysanEs le libre choix des semences qu’ils utilisent, en interdisant le brevetage du vivant.
Une vraie loi « biodiversité »
Il nous faut une loi spécifique et ambitieuse de protection de la biodiversité qui devra inclure :
– La protection de toutes les espèces à statut de conservation défavorable (par exemple, les 2/3 des espèces d’oiseaux chassés en France), une réforme de la chasse, l’obligation de démontrer l’impact d’une espèce sur l’économie ou la biodiversité avant d’envisager des mesures de régulation.
– Un recensement de tous les lieux ayant vocation à devenir des réservoirs de biodiversité et leur protection forte par déclaration d’utilité publique (DUP). Il faut atteindre rapidement 10 % du territoire français en protection forte (et non 2 % comme annoncé dans le plan).
– Une obligation, dans les études d’impact, de prise en compte des alternatives économiques et spatiales, en amont des projets d’aménagement, ce qui donnera corps à la notion d’évitement.
– La suppression du principe de mesures compensatoires et le renforcement réglementaire des mesures de réduction des impacts, avec la possibilité pour les pouvoirs publics de refuser tout projet si les mesures de réduction sont considérées comme insuffisantes. Considérer que l’on peut compenser les impacts négatifs, c’est donner en fait un droit à détruire.
– Le renforcement des possibilités pour les associations agréées de protection de la nature de contester en justice si les mesures de réduction sont jugées insuffisantes.
– La mise en place d’un partenariat avec les associations nationales et régionales, avec financement de leurs projets (connaissance scientifique, éducation des citoyens, gestion des espaces protégées).
– La création d’une véritable expertise scientifique au niveau national et régional, indépendante de l’État et des lobbies.
– Un ministère avec des moyens financiers de fonctionnement et d’actions.
– L’obligation pour les régions d’investir pour la biodiversité (autour de 20 millions d’euros annuels par région).
– La mise en place d’indicateurs pour juger de l’état de la biodiversité, suite à ces politiques et la mise en place d’échéanciers précis.
Faute de quoi, on en reste à des déclarations d’intention sans effets réels.
L’état de la biodiversité est révélateur de l’état de santé de la planète et des sociétés. Nous avons besoin d’un plan de modification en profondeur du système, donc de sortie du capitalisme. Sauver la biodiversité, le climat, préserver la vie sur Terre, passe par des luttes collectives et internationales, se renforce avec les solidarités entre les peuples, sera possible si nous coordonnons et réunissons toutes les luttes dont l’ennemi commun est identifié : le capitalisme. Mais il nous faudra aussi revoir nos modes de production, de consommation, de déplacement, de construction, chercher à rééquilibrer en faveur des pays du Sud, interroger notre relation à la nature… Un vrai enjeu pour un autre monde.