Publié le Jeudi 24 octobre 2024 à 11h00.

COP16 en Colombie : La biodiversité, si on en parlait vraiment ?

Quand « Libération » annonce la COP16, c’est pour signaler que l’hymne colombien a été interprété par des chants d’animaux et « Ouest-France » pour craindre le chantage d’une faction armée issue des FARC... À part ça, rien à signaler ?

Pourquoi COP16 ? On croyait en être à la 28 ? En fait, il y a trois COP (pour Conférence des parties), toutes trois issues du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. L’une concerne le climat, elle est annuelle (c’est celle-là, la COP28) ; une autre s’occupe de la désertification (décembre 2024 en Arabie saoudite) ; et la troisième s’intéresse à la biodiversité. Les deux dernières étant bisannuelles, cela explique le chiffre 16 !

La COP16 qui nous intéresse ici, organe directeur de la Convention sur la diversité biologique, se tient à Cali (Colombie) entre le 21 octobre et le 1er novembre 2024, autour de trois enjeux : les indicateurs de suivi, le point sur les engagements des États, les financements pour la biodiversité. 

Le cadre issu de la COP 15

La COP15 (présidée par la Chine, tenue à Montréal en 2022) a abouti à l’adoption du Cadre mondial pour la biodiversité Kunming-Montréal, visant à « lutter contre la perte de biodiversité, à restaurer les écosystèmes et à protéger les droits des populations autochtones », en mettant sous protection « 30 % de la planète et 30 % des écosystèmes dégradés d’ici à 2030 ». C’est eux qui le disent... et, à quelques jours de l’ouverture de la COP16, seuls 25 pays sur 195 avaient publié leurs engagements, censés détailler comment ils comptaient s’y prendre pour y parvenir.

Les crédits biodiversité !

La COP16 doit débattre des mécanismes de financement, pour trouver 200 milliards de dollars par an, provenant de toutes les sources, notamment du secteur privé, et assurer une augmentation des financements pour les pays en développement de 30 milliards de dollars par an d’ici 2030. 

Sans surprise, pour trouver tout cet argent, la COP devrait miser sur la mise en place des « crédits biodiversité ». Malgré la très mauvaise expérience des « crédits carbone », porteuse de nombreux scandales, malgré les craintes d’écoblanchiment, et en l’absence de norme mondiale ou de marché international régulé, cette perspective tient la corde. 

Or ces outils financiers cherchent à monétiser des actions de « sauvegarde de la nature », à donner un prix à la « compensation » directe de la destruction d’écosystèmes causée, par exemple, par un projet minier ou d’autoroute, ou à valoriser des contributions volontaires d’entreprises ou d’États pour, par exemple, accompagner un producteur de caoutchouc dans une gestion plus durable de sa forêt...

Agir ? 

La COP16 va donc parler de beaucoup d’argent, mettre en scène les responsables de la catastrophe prétendant... la résoudre ! Inutile, donc, de s’attendre à des miracles 1 ! La biodiversité reste trop souvent absente du débat public, mais à Notre-Dame-des-Landes ou avec les actions des Soulèvements de la Terre, la défense de la biodiversité s’oppose concrètement aux politiques dites de « compensation » qui uniformisent et marchandisent le monde. Défendre la biodiversité contre le productivisme capitaliste impose de promouvoir une autre vision du monde, un projet de société écosocialiste, fondé sur la sobriété, sur la définition démocratique des besoins, tenant compte des limites de la planète. Alors, parlons-en vraiment !

Commission nationale écologie

 

  • 1. Pour une analyse critique de la crise de la biodiversité et des mesures à mettre en œuvre, voir l’article sur le site : https://lanticapitaliste…