À en croire le gouvernement, on peut tout prolonger. Ainsi, après l’âge de la retraite, voici la prolongation de l’âge des réacteurs nucléaires.
Le 16 mai 2023, l’Assemblée nationale, après le Sénat, a adopté le projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes par 399 voix favorables (10 PCF, RN, LR, la galaxie macroniste et LIOT) 100 voix contre (LFI, 5 PCF, EÉLV) et 39 abstentions (PS, 5 PCF).
Le Sénat avait exclu de cette loi le projet de fusion de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avec l’autorité de sûreté (ASN), à la suite des mobilisations des salariéEs, mais il a aussi retiré « l’imposition aux collectivités locales de réduire de 50 % le rythme de consommation des espaces naturels et agricoles d’ici à 2050 » concernant les futurs réacteurs EPR. Il a ainsi mis fin à la limitation sur l’impact des constructions de réacteurs et d’espaces de stockage des déchets qui protégeait, un peu, les sols et la biodiversité.
En outre, la loi simplifie les procédures d’urbanisme liées aux projets de futurs réacteurs et d’entreposage de combustibles. La loi Littoral ne s’appliquera pas aux futurs réacteurs en bord de mer s’ils sont construits à « proximité d’une installation nucléaire préexistante », comme à Flamanville. Enfin la loi confère « une présomption de raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM) à la construction de réacteurs nucléaires », mesure prévue initialement pour favoriser les énergies renouvelables. Comme si les retards des projets de construction nucléaire (EPR Flamanville) étaient dus à des délais administratifs, et non pas à des incidents, des défauts de soudures, des malfaçons et des dépassements pharaoniques des budgets.
Une loi pour prolonger les installations nucléaires existantes
Le véritable objectif de cette loi : faciliter la prolongation de la durée de vie des installations nucléaires existantes. Même le gouvernement et l’industrie nucléaire sont conscients que la construction de 14 EPR2 (six officiellement annoncés) et de SMR (petits réacteurs modulaires de faible puissance) bien que facilitée, ne permettra pas la « relance du nucléaire » en raison des coûts qui en limitent le nombre. Il leur faut donc pousser au maximum le fonctionnement des réacteurs existants. La loi supprime donc le rapport quinquennal, qui atteste de l’état d’une installation nucléaire au-delà de sa 35e année d’exploitation et la procédure de mise à l’arrêt définitif des centrales à l’arrêt pendant une durée continue supérieure à deux ans.
Les 56 réacteurs en fonctionnement en France ont été conçus pour une durée d’exploitation de 30 ou 40 ans. Aujourd’hui la moyenne d’âge de ces réacteurs est de 36,6 ans, et plusieurs ont déjà fêté leur 40e anniversaire.
Prolonger l’exploitation du parc au-delà de la durée prévue lors sa conception représente donc un risque majeur pour la sûreté des populations et des personnels et fait rentrer ce mode de production d’électricité dans la zone rouge.