Publié le Samedi 28 mars 2020 à 00h28.

Chez Safran Gironde « l’économie ne doit pas s’arrêter »

Notre patron a retenu l’essentiel des discours du gouvernement : « l’économie ne doit pas s’arrêter ». Et ce sont les patrons des gros groupes les plus féroces pour nous obliger à travailler alors que le gouvernement hypocrite appelle le reste de la population à se responsabiliser.

La morale, les amendes pour les uns ! Et la liberté de faire travailler sur des activités non essentielles face à la crise pour les gros boss ! 

Ce sentiment est partagé par beaucoup de salariés qui sont en contact par Whatsapp.

Nous, syndicats et salariés, avons dû batailler différemment pour que l’établissement ISE de Safran Electrical and Power (SEP ex-Labinal) ferme mardi 17 mars. Beaucoup de questions posées durant cette journée : a-t-on le droit d’exercer notre droit de retrait ? Est-ce que nous délégués, on pose un Danger Grave et Imminent ? On n’a pas beaucoup produit pour le coup !

Des collègues travaillant sur Dassault Argenteuil ont exercé leur droit de retrait des espaces confinés. Les copains de la CGT Dassault de ce site, à 4, ont déposé un DGI, fait le tour de l’usine pour appeler à la grève pour que la boite ferme. Sur Dassault Mérignac, déjà, pas mal de camarades de la CGT étaient absents pour garde d’enfants, c’était plus compliqué pour le rapport de forces.

Nos patrons de Safran ont finalement fermé toutes les boites du groupe, sous notre pression... pour trois jours et ce, dès le mercredi matin. Tous les collègues travaillant pour les clients sont restés à la maison : Dassault, Airbus, Airbus Helicopter ont fermé les mêmes jours, Sabena a décidé de fermer quinze jours comme Air France, Arianegroup n’a fermé qu’à 13h le mercredi, DFS a continué ses activités.

Des CSE extraordinaires ont lieu par conférence téléphonique tous les jours. 

Safran a pondu des « mesures sanitaires pour reprise d’activité partielle », à faire respecter dont voici quelques unes : décontaminer, désinfecter, porter des masques dont la médecine du travail nous dit bien de comment nous en passer, du gel hydroalcoolique, nettoyage du poste avant et après prise du poste, respecter la distance d’1 mètre... pas forcément possible dans un cockpit !

Bref, au dernier CSE extraordinaire d’aujourd’hui, on nous apprend que deux salariés reprendraient aux IEV à Airbus Blagnac (essai en vol, activité super essentielle...). On nous apprend que la décontamination n’aura pas lieu. La médecine du travail couvre et accepte la dérogation aux exigences Safran. Leur argumentation : 72h sans personne dans les locaux d’après les experts scientifiques nationaux, il n’y a pas de risque. Possible, mais, on ne leur fait pas confiance.

Donc, tout se déroule ainsi, il y a des exigences mais comme notre direction n’exige rien du client, ils dérogent.

Alors pourquoi ont-ils besoin des délégués en CSE s’ils ont réponse à tout ? Pour faire croire encore une fois au dialogue social et pour qu’on donne en tant que délégués, notre aval afin que des collègues reprennent. 

La CGT pour SEP a adressé un courrier au DRH : y est demandé une validation écrite du directeur et de la médecine du travail s’ils exigent de nous d’aller travailler ; et bien, ils ne veulent pas signer ! Pas étonnant.

D’autres établissements de SEP comme Réault et Vichy ont repris. Les collègues sont furax, mais tous attentistes d’une réaction commune qui ne vient pas pour l’instant, du fait qu’on soit complètement éclatés et livrés à nous-mêmes, même s’il y a des syndicats et whatsapp.

La situation actuelle des salariés de SEP est celle-ci : les trois jours de la semaine dernière sont payées à 100% ; pour cette semaine, certains sont en chômage partiel payés à 70% du brut pour les non cadres, 100% pour les cadres, d’autres sont en télétravail (jusqu’à quand, car sans interlocuteurs dans nos activités, c’est plus compliqué), d’autres en garde d’enfants payés par la CPAM, d’autres en arrêt pour suspicion de covid, d’autres en quarantaine. La direction « propose » aussi, pour ceux qui « veulent » de poser des congés ou RTT plutôt que d’être en chômage partiel.

Macron a raison, c’est la guerre, mais pas contre le virus. C’est la guerre, la lutte de classe exacerbée par la soi-disant lutte contre le virus.

La note qu’on aura à leur faire payer s’allonge et sera bien salée.