La conférence sociale qui réunit gouvernement, syndicat et Medef veut faire croire que les dizaines de milliersde licenciements pourraient être évitées en discutant autour d’une table.Au moment où se concrétise de plus en plus brutalement la suppression de dizaines de milliers d’emplois touchant tous les secteurs, de l’automobile au commerce, en passant par l’agroalimentaire ou les centres d’appels, le gouvernement « prend le temps du dialogue social ».Une guerre socialePourtant plus que le dialogue, c’est l’affrontement social qui est à l’ordre du jour. À l’heure des fermetures de sites et des milliers de suppressions d’emplois, le Medef ne s’y trompe pas. Le patronat propose la libéralisation du contrat de travail dont un CDI avec de moindres droits, « les ruptures conventionnelles » collectives, c’est-à-dire la perte de toute possibilité de contestation des licenciements économiques, ou les accords emplois-compétitivité permettant la réduction du salaire, l’augmentation du temps de travail, la perte de jours de congés ou de temps de pause sans accord des salariéEs. Toujours plus exigeant en matière de rentabilité et de profitabilité, le patronat voudrait imposer l’accroissement de la flexibilité du travail. Avec la flexisécurité, c’est-à-dire avec une intensification du travail, des horaires dépendant des carnets de commandes immédiats au détriment de la santé au travail et le non-paiement des heures supplémentaires ou des week-end travaillés.L’État employeur n’est pas en reste. Blocage des salaires, des déroulements de carrière, non-remplacement de deux fonctionnaires sur trois hors secteurs dits préservés (éducation, police, justice), maintien des suppressions de postes à l’hôpital et dans toute la fonction publique territoriale sont à son programme.Pour ce qui est du financement, tout est ficelé par le refus de mise en cause de la dette publique.Cette dette due, pour l’essentiel, à la réduction des rentrées fiscales du fait des cadeaux au patronat et aux plus riches. Du coup, les solutions sont identiques à celles de tous les gouvernements. Pour financer la protection sociale, les retraites : prélèvements supplémentaires au travers d’une hausse de la CSG, des impôts vont pénaliser davantage les salariéEs.Pour les employeurs, les obligations se limiteront à de vagues négociations sur l’égalité homme-femme, l’emploi des jeunes ou la formation. Quant au contrat de génération, il s’agit une nouvelle fois d’exonération de cotisations contre de prétendues embauches.Refuser de cautionner les reculsMalheureusement, les organisations syndicales acceptent pleinement de participer à cette imposture. Il ne suffit pas de crier dans les manifestations que « ce n’est pas à Matignon qu’on obtiendra satisfaction », il faut dénoncer cette politique qui tend à faire croire que salariéEs, retraitéEs, chômeurEs, jeunes auraient des intérêts communs avec les patrons du CAC 40.De la même façon, il faut s’opposer clairement à une politique gouvernementale dont les premiers actes ne marquent pas de rupture avec tous les gouvernements qui acceptent la dictature de la finance et du patronat : hausse insignifiante du Smic, blocage des salaires des fonctionnaires maintien du même cadre politique à l’encontre des immigréEs, etc.La CFTC, la CFE-CGC et la CFDT sont totalement acquises à cette politique de dialogue social et prêtes, à négocier la flexisécurité, la mise en cause de la retraite par répartition au profit d’un système par points. La radicalité verbale de FO ne résiste pas à la pratique réelle de ses animateurs, plus souvent prêts à la négociation à froid qu’à la mobilisation. Quant à la CGT, les incertitudes sur la succession de Bernard Thibault ne justifient certes pas la discrétion de la confédération, des fédérations, de la plupart des unions départementales dans les batailles engagées par les salariéEs de PSA, Technicolor, Fralib, La Poste, Air France et autres.Construire la riposteL’urgence sociale appelle une toute autre politique. L’interdiction des licenciements, le retour à la retraite à 60 ans pour tous, la réduction du temps de travail, l’obligation réelle d’égalité homme-femme, le relèvement de tous les revenus à 1 700 euros minimum, ne se négocieront pas avec le Medef, même dans les bureaux de Montebourg ou de Moscovici.Ceux de PSA, de SFR, de Carrefour, etc., pour les 80 000 salariéEs dont les licenciements sont d’ores et déjà annoncés ne peuvent attendre le bilan promis par Hollande dans un an.La responsabilité des organisations syndicales, ce n’est pas le dialogue social, c’est d’organiser la mobilisation, la coordination des luttes, dès maintenant.
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