Alors que les cheminotEs, en grève depuis une semaine, manifestaient dans la matinée devant l’assemblée nationale, peu de députés étaient présents le mardi 17 juin dernier à l’ouverture du débat sur la réforme ferroviaire dont l’adoption a eu lieu le mardi 24 juin. Sans grande surprise, cette réforme a été largement adoptée par le gouvernement et ses alliés qui ne voulait rien céder aux grévistes.
En ouverture du débat le 17 juin, Cuvillier, secrétaire d’État aux Transports, a fait le job à la tribune de l’hémicycle en indiquant que cette réforme ferroviaire était une nécessité « pour sauver et assurer la pérennité du service ferroviaire », mais aussi pour « créer un groupe public puissant », capable de faire face aux « enjeux de ces dernières années »... Bref les cheminots grévistes n’auraient rien compris ! Selon le gouvernement, cette réforme est donc ce qui est arrivé de mieux à la SNCF et aux cheminots depuis des années… C’est aussi ce que pense l’ensemble des députés PS, y compris les prétendus frondeurs qui ont défendu la réforme. Mais c’est également la pensée profonde des écologistes, puisque Duflot a affirmé que c’était « une bonne chose de réunifier RFF, les rails, et la SNCF, les trains. Cette réforme est une bonne réforme », bien loin d’être une opposition quelconque à ce gouvernement. La majorité est donc unie derrière ce projet qui éclate l’entreprise en trois entités rendant possible la privatisation des entités les plus rentables, un projet soutenu également par les députés de l’UDI. Empêtrée dans ses affaires, l’UMP est aussi divisée face à cette réforme. Certains députés comme Bussereau, ancien ministre du secteur, ont majoritairement voté contre car ce texte « est complètement antieuropéen et complètement anticoncurrentiel ! ». D’autres, tel Henri Guaino disait la veille du vote approuver la réforme : « L’opposition doit être constructive. Quand la majorité va dans la direction dans laquelle nous avions commencé à aller, je ne vois pas pourquoi je dirais c’est mauvais parce que c’est vous »...
Des « concessions »... pour arrêter la grève ?Empêtré dans la grève, le gouvernement Valls-Hollande a trouvé une porte de sortie grâce aux amendements du Front de gauche et des écologistes adoptés mercredi 18 juin. Qualifiés de « différences majeures » par rapport à la version initiale du texte, ces amendements visaient soi-disant à rassurer les cheminots. Les députés ont notamment adopté un amendement écologiste soulignant « le caractère indissociable et solidaire » des trois entités – SNCF, SNCF Mobilité et SNCF Réseau – créées par la réforme. Autre pseudo concession : la création d’un comité central d’entreprise au niveau du groupe et la validation d’un amendement du Front de gauche confirmant que le groupe SNCF est « l’employeur des agents et des salariés des trois Epic ». Pour André Chassaigne, ces amendements sont la preuve que les grévistes n’ont « pas fait grève pour rien » et s’est réjoui que les cheminots gardent « un employeur unique » et « qu’ils puissent s’ils le souhaitent muter d’un service à l’autre, avoir les mêmes négociations salariales, la même fiche de paie, tout ce qui est porté sur le 1 % logement, l’allocation-chômage ». On connaît le rôle joué par l’adoption de ces amendements dans les assemblées générales de grévistes qui ont suivi. Pourtant, Chassaigne affirmant le jour du vote que « la question de la dette n’a pas été réglée », les députés du Front de gauche ont donc finalement voté contre la réforme ! Tout ça pour ça...
Sandra Demarcq