Comme dans tous les secteurs économiques et industriels, la sauvegarde ou la restauration de la compétitivité sont les arguments invoqués pour justifier les plans sociaux les plus brutaux. Reste à trouver les explications à des problèmes de compétitivité. Dans le secteur des télécoms, c’est facile : c’est la faute à Free.Il faut dire que pendant des années, ce secteur a servi de vache à lait pour les grands groupes de communication que sont Bouygues ou Vivendi. Le secteur des télécommunications a connu un développement rapide qui s’est accéléré à partir de la deuxième moitié des années 1990, avec l’apparition du GSM et de l’Internet. Mais la croissance réelle du secteur s’est rapidement transformée en une gigantesque bulle financière qui a été à l’origine de l’une des pires crises sectorielles qu’ont connues les économies modernes. Les formidables investissements rendus nécessaires par la course à l’évolution technologique (UMTS, 4G) sont contradictoires avec la recherche des profits immédiats. Pourtant, France Télécom (maison-mère d'Orange) va verser 3,7 milliards d'euros de bénéfices à ses actionnaires au titre de l'année 2011. Le plus surprenant c’est que ces groupes géants, grands défenseurs de la concurrence libre et non faussée, se prétendent victimes de la concurrence « déloyale » de Free, dernier arrivée sur le marché de la téléphonie mobile. Free est dénoncé pour une politique sociale pire que celle des autres opérateurs et pour s’appuyer sur le réseau de France Télécom. Ces groupes sont pourtant les spécialistes de conditions de travail dégradées notamment dans les centres d’appels largement externalisés et illustrées par les suicides à France Télécom.Ainsi, dans ce secteur comme dans d’autres, les suppressions d’emplois sont liées à l’intensification du travail. Les organisations syndicales redoutent la suppression de 60 000 emplois directs ou indirects. Le 15 mai, Bouygues affirmait n'avoir perdu que 210 000 abonnés au premier trimestre et, lors de la présentation des résultats annuels 2011 à la fin février, Martin Bouygues avait souligné que les charges de personnel ne représentaient que 12 % des coûts de l'opérateur. Et pourtant, la filiale de Bouygues a présenté mardi 3 juillet, en comité central d'entreprise, un plan de départs volontaires portant sur 556 postes et a prétendu ne procéder à aucun licenciement. De même, chez SFR, la direction annonce une restructuration dans laquelle les syndicats redoutent un impact de l'ordre de 10 % des effectifs (10 245 à fin 2011), soit entre 800 et 1 200 surpressions d'emplois. Pourtant, selon la CFDT de SFR, « la masse salariale ne représente que 4,5 % du chiffre d'affaires de l'entreprise ». « Même si on virait tout le monde, la société ne gagnerait pas beaucoup plus d'argent ! » assure-t-il.La « panne » d’Orange de la semaine dernière a révélé l’extrême dépendance aux réseaux de communication privatisés. Au-delà de l’indispensable refus de tout licenciement et suppression de poste, c’est aussi la question d’un service public des télécommunications qui est posée.