A l’appel des organisations Unsa-VTC, Capa-VTC, et Actif-VTC, des centaines de chauffeurs VTC (parmi les 22 000 en France) se sont mobilisés du 15 au 22 décembre, via des opérations escargots ou des blocages temporaires d’axes routiers. Leur cible : la plateforme Uber, qui se gave sur leur dos et les empêche bien souvent de gagner le Smic malgré de nombreuses heures de travail.
Il y a un peu plus d’un an, Uber avait baissé les tarifs des courses de 20 %, diminué le prix de la course minimale de 8 à 5 euros... tout en maintenant sa commission de 20 %. Au début du mois de décembre, Uber a annoncé que sa commission serait désormais de 25 %, tout en annonçant une hausse du prix de la course minimale de 5 à 6 euros et une hausse des tarifs de 10 à 15 %. En outre, Uber a proposé la création d’un fonds de deux millions pour aider les chauffeurs en difficulté. Une piètre compensation pour les chauffeurs, et un partage toujours plus inégal entre eux et Uber. Pendant ce temps, le gouvernement a courageusement nommé un « médiateur » qui doit faire des propositions... le 31 janvier !
Les organisations de chauffeurs VTC ont rejeté les propositions d’Uber. Elles appellent à la poursuite du boycott de l’application Uber et annoncent une reprise de la mobilisation début janvier. Elles revendiquent le retour immédiat à un prix minimal de la course à 8 euros et à une commission d’Uber de 20 %. Elles dénoncent les pratiques scandaleuses de déconnexion qui peuvent priver les chauffeurs d’accès à la plateforme du jour au lendemain, par exemple à la suite de commentaires négatifs d’un client. Pour couronner le tout, Uber a annoncé son intention de lancer des « taxis robots » : les chauffeurs auraient alors le choix entre accepter une exploitation toujours plus féroce... ou être remplacés par des robots !
Pour un grand service public du transport individuel
Au-delà des revendications immédiates, c’est la question du statut des chauffeurs qui est désormais sur la table. Ceux-ci ont aujourd’hui un statut d’indépendant (souvent d’auto-entrepreneur) qui permet à Uber de ne pas leur assurer les droits fondamentaux à un salaire minimum, à des congés, etc. Loin de l’idéal illusoire d’être son propre patron, ils sont dans une précarité totale. Fin octobre, la justice britannique a estimé que les chauffeurs d’Uber devaient être considérés comme des « salariés » avec les droits qui vont avec. Un jugement qui pourrait avoir des conséquences énormes. En France, les organisations de chauffeurs ont dit vouloir saisir la justice pour requalifier les contrats avec Uber en contrats de salariat.
Il y a un an, Uber avait cherché à mobiliser les chauffeurs VTC contre les taxis. Aujourd’hui, ces chauffeurs VTC n’affrontent pas leurs collègues, mais leur ennemi commun : les plateformes capitalistes, qui utilisent une nouvelle technologie pour exercer une pression vers le bas sur le niveau de vie des chauffeurs. Ces plateformes devraient être expropriées, et remplacées par un grand service public du transport individuel (indispensable pour les personnes âgées, les malades, etc.). Les chauffeurs devraient pouvoir accéder au statut de salarié, et mieux, de fonctionnaires de ce nouveau service public. À la mise en concurrence généralisée des chauffeurs, nous opposons leur droit, comme à chacun d’entre nous, au salaire à vie, en rupture avec la logique du marché du travail.
Gaston Lefranc